En quête de 40 milliards d’économies en 2026, le gouvernement promet au secteur de la mobilité de lui dégager des moyens supplémentaires… « pour l’horizon 2030, 2040 ». Avant le lancement lundi 5 mai à Marseille par François Bayrou de trois mois d’assises baptisées « Ambitions France Transports » consacrées à la crise de financement du secteur, les conseillers du Premier ministre et du ministre des Transports ne font pas de mystère. « Le sujet n’est pas le prochain projet de loi finance », « même si le gouvernement est ouvert à toutes les solutions de financement nouvelles » euphémise l’un d’eux.
A ces éventuels grincements de dents, le gouvernement a associé plus d’une soixante de parties prenantes. On retrouve comme pour les Assises de la mobilité en 2017 le traditionnel cortège d’élus, d’experts, de représentants du millefeuille administratif française, d’associations professionnelles. Parmi les copilotes des quatre ateliers, notons la présence de Jean Coldefy, Yves Crozet, Gilles Savary, Didier Mandelli, Hervé Maurey, Olga Givernet.
Pour les solutions pérennes, durables, l’Etat mise sur des contrats de concessions d’autoroute beaucoup plus équilibrés en sa faveur. Le surcroit de recettes seraient fléchés vers l’entretien des réseaux. « Tout le monde lorgne les recettes d’autoroutes mais sans savoir quel sera le montant disponible » souligne Michel Neugnot représentant de Régions des France dans l’atelier (N°2) consacré aux routes. De toutes manières, ce n’est pas pour tout de suite. Les cartes ne seront pas rebattues avant la fin des concessions historiques qui s’achèvent entre 2031 et 2036 !
Fin juillet, date prévue pour la publication des différents scénarios tirés des cogitations présidées par Dominique Bussereau, il ne faudra pas s’attendre à des recettes miracles pour solutionner la crise chronique résumée par le ministre des transports : « Il nous faut chaque année 2 milliards d’euros pour le ferroviaire et 1,5 milliard pour les routes pour résorber la dette grise c’est-à-dire pour ne pas avoir à payer les surcoûts de réparation a posteriori », souligne Philippe Tabarot (La Tribune 16/04).
Et si cette “Ambition“ – revenait à une opération de lobbying du secteur des Transports, des Collectivités locales et des travaux publics face à Bercy pour limiter le rabotage supplémentaire de ses crédits ? « C’est un résumé un peu ridicule » s’irrite l’exécutif. En tous cas, le principe de réalité préside. Depuis l’élection d’Emmanuel Macron en 2017, la dette de l’Etat a augmenté de 1024 milliards d’euros soit 113 % du PIB fin 2024. L’Etat compte serrer la vis dans l’espoir de ramener le déficit 3% en 2029. Déjà les infrastructures ont subi un gel de plusieurs centaines de millions de crédits et les aides à la décarbonation sont fragilisées. Et par ailleurs, en supprimant l’AFIT-F, les parlementaires ont sabordé un outil qui permettait de garantir des crédits pluriannuels.
L’exécutif a chargé la barque d’Ambitions France Transport, ajoutant au menu un florilège de problèmes mal traités ou suscités par la loi-monument d’orientation des mobilités (LOM) datant de 2019 : Le financement des transports urbain, pas loin de la rupture, et des SERM (atelier 1), et du fret (4) qui s’additionnent à la route (2) et au rail (4) avec des sous-thèmes : le financement des poids lourds électriques, la logistique urbaine, l’avenir des pistes cyclables etc. Et cette question explosive : priorité à l’entretien du réseau ferré, aux petites lignes ou aux LGV relancés par Jean Castex quand il était à Matignon ?
Des signes émis par le gouvernement montrent que la schizophrénie risque de perdurer. Philipe Tabarot, élu des Alpes-Maritimes profitera de son passage à Marseille le 5 mai pour conclure le comité de pilotage de la ligne nouvelle Provence- Côte-d’Azur.
On note aussi que pour ne rien perdre du déplacement du Premier ministre, le cabinet de François Bayrou a passé consigne aux suiveurs. « Pour le trajet aller, nous recommandons le vol Air France AF6004 Paris-Marseille » et pour le trajet retour le vol AF 341.
Un point acquis : l’avion a de l’avenir !
Marc Fressoz