La crise des finances publiques commence à monter à bord des bus. Le principe de réalité atteint en effet Annecy et son agglomération dont les élus ont, au mois d’avril, sensiblement réduit l’offre de service des bus sur certaines lignes. Habituellement, les ajustements se concrétisent plutôt à la rentrée scolaire mais la gestion du réseau haut-savoyard via une société publique locale, la SIBRA favorise l’application rapide de décision.
« Nous sommes rattrapés par une réalité budgétaire » a justifié Dider Sarda dans les colonnes du Dauphiné. Vice-président Mobilités du Grand Annecy, il préside à ce titre la SIBRA, L’autorité organisatrice fait machine arrière car elle n’a plus assez de souffle pour tenir le mini-choc d’offre opéré ces dernières années, « Il aurait fallu 2,5 millions d’euros pour les bus si nous étions restés sur la trajectoire de 2025 » ajoute-t-il.
Une telle situation contraste avec le tableau général rassurant dressé par les administrations centrales à l’occasion de la conférence Ambition France Transport. Dans un livret de cadrage publié par le site Contexte, l’Etat estime, sur la base d’un rapport de IGF et de l’IGEDD, que les autorités organisatrices locales ont « une bonne santé financière et des indicateurs qui s’améliorent entre 2019 et 2023 ». Tout va très bien Madame la Marquise…
Pour faire face aux enjeux de la transition énergétique, le rapport recommande d’augmenter les tarifs dont la part dans le financement des transports est minoritaire en France ( 1/3 contre 50 % chez nos voisins), d’utiliser au maximum le versement mobilité réglé par les entreprises – qui fait encore preuve de dynamisme malgré la hausse du chômage mais aussi de réaliser des efforts d’exploitation pour « améliorer la performance des services ». En somme des solutions de bon sens mais qui ne suffiront sans doute pas dans un contexte de disette budgétaire. Le pire est à venir avec la nouvelle réduction de la Dotation globale de fonctionnement à laquelle les maires s’attendent en 2026, qui les contraindra à des économies importantes.
A Annecy, la contraction de l’offre touche un certain nombre de lignes selon les périodes : les samedis (-8 % d’offre), les dimanches, les jours fériés, et les vacances scolaires. Sur un service comme la ligne 11 reliant l’hôpital à des communes de l’agglomération, la réduction atteint 40%. Sur les rives du lac embouteillées l’été, le cadencement de certains services à 20 minutes est supprimé. Et de façon uniforme, un couvre-feu s’impose désormais à tous les bus avant minuit quand certains circulaient jusqu’à 1H30.
La controverse locale engendrée par cette réduction revêt un tour d’autant plus politique à l’approche des municipales de mars 2026. La décision prise par le Grand Annecy que préside l’élue Renaissance Frédérique Lardet met en difficulté le maire d’Annecy François Astorg. Avec son étiquette écologiste, il a conquis la ville en 2020 avec naturellement l’optique de développer les alternatives à la voiture.
Son poste suscite de nombreuses convoitises puisqu’on parle notamment des ambitions de l’ex-ministre de l’Économie Antoine Armand député de Haute-Savoie. Vice-président infrastructure et transport en commun du Grand Annecy, le maire d’Annecy doit avaler les couleuvres et les attaques d’associations qui ont lancé une pétition numérique au succès relatif (1100 signatures) concernant les transports en commun.
L’exemple annécien fournit un cas de figure intéressant appelé à se décliner un peu partout. Lors d’un conseil d’agglo le 17 avril, une vice-présidente écologiste, Marion Lafarie a proposé de réduire la voilure des vélos en libre-service dont le coût de fonctionnement annuel atteint 1,5 million d’euros. « Mettons plutôt cet argent dans les bus » a lancé l’élue qui, au sein du conseil municipal d’Annecy a pris ses distances avec le maire François Astorg. Autobus ou bicyclette ? transport collectif ou transport individuel ? Une question sociale et sociétale
Marc Fressoz