« Grand Reims Mobilités est un levier de transformation du territoire »
Mobily-Cités : Depuis le 1er janvier 2024, le réseau CITURA est devenu Grand Reims Mobilités. Que symbolise ce changement d’identité ?
Laurent Py : Ce changement dépasse le simple cadre d’un rebranding. Il traduit une volonté politique et opérationnelle forte : celle d’unifier les mobilités sur l’ensemble des 143 communes du Grand Reims, tout en affirmant une nouvelle ambition. Avec Grand Reims Mobilités, nous entrons dans une ère où les mobilités doivent répondre à des enjeux écologiques, sociaux et territoriaux. C’est une transition dans la continuité, qui prolonge l’héritage de CITURA tout en posant les bases d’un réseau plus large, plus moderne et plus intégré. Nous avons mis en place un véritable changement d’échelle puisque nous sommes passés de 16 communes de Reims Métropole aux 143 communes du Grand Reims mobilités. Grand Reims mobilités est l’un des premiers service public de notre jeune intercommunalité. C’est un élément de cohésion qui a été plébiscité par les maires dès l’élaboration du projet de territoire.
Pourquoi avez-vous décidé de changer d’exploitant pour le réseau de transports du Grand Reims ?
Auparavant, nous n’étions pas directement en lien avec l’exploitant du réseau. Nos échanges se faisaient principalement avec la société MARS, qui regroupait plusieurs actionnaires issus de secteurs très différents : des banques, des entreprises du BTP, Alstom, Transdev… Elle n’a jamais été recapitalisée suite à la mise en service du tramway. Cette configuration rendait la gestion extrêmement complexe et lourde, car chaque décision nécessitait un consensus entre des partenaires aux intérêts parfois divergents. Son champ d’intervention était restreint aux 16 communes historiques de Reims Métropole. Il nous est donc apparu évident qu’il fallait mettre un terme à ce modèle. Nous avons résilié le contrat et fait le choix de lancer une consultation délégation de service public sur une durée courte de sic ans Plusieurs opérateurs y ont répondu, et c’est Transdev qui a présenté l’offre la plus solide, en phase avec la vision et les enjeux du territoire, notamment dans le domaine rural où portaient les attentes.
Vous avez donc signé un nouveau contrat de concession en octobre 2023. Quels sont les grands axes de ce partenariat ?
Comme je vous le disais précédemment, nous étions historiquement sur uncontrat dinosaure d’une durée de 30 ans de type PPP comme il en existait encore à l’époque. Nous avons résilié ce contrat en 2021, en réglant après négociations les indemnités de résiliation. La situation financière de la société concessionnaire MARS était trop fragile pour investir, notamment dans la transition énergétique du parc. Aujourd’hui le nouveau contrat signé avec Transdev vise à réorganiser et élargir l’offre de manière cohérente avec la diversité de notre territoire, entre zones urbaines denses et ruralité. Il repose sur une stratégie multimodale : tramways, bus urbains et périurbains express, transport à la demande, vélo, services numériques… Il s’agit d’une approche globale pour offrir des solutions adaptées à tous les profils d’usagers, qu’ils soient étudiants, actifs, personnes âgées ou en situation de précarité. Et l’une des grandes avancées que nous avons réalisées avec Transdev c’est qu’à la fin du contrat, les 135 véhicules du parc seront en énergie verte, électricité, gaz-bio gaz et HVO le tout répartis en 1/3.
L’arrivée de lignes de BHNS à la fin 2025 est un moment fort. Que pouvez-vous nous dire sur ce projet ?
C’C’est effectivement l’un des piliers du réseau de demain. Le Bus à Haut Niveau de Service (BHNS), c’est un peu le bus réinventé : un design inspiré du tramway, un confort premium, une motorisation 100 % électrique, et une fréquence élevée. Deux lignes structurantes desserviront des axes stratégiques, dont les campus universitaires actuels et futurs, la gare, le centre-ville et des quartiers prioritaires de la ville. Ce projet n’est pas qu’un projet de transport : c’est un projet de transformation urbaine, qui accompagne la requalification de l’espace public, notamment en hypercentre avec le projet de voie des sacres, et favorise les mobilités décarbonées. C’est un véritable vecteur de transformation territorial.
J’insiste sur le soin particulier que nous avons apporté à la conception de nos nouveaux véhicules en collaboration avec Iveco. Les bus articulés de 18 mètres, des Heuliez GX 437E 100 % électriques, ont été conçus sur mesure. Leur aménagement intérieur se distingue par une ambiance chaleureuse et raffinée : des teintes champagne, des motifs évoquant les bulles… tout a été pensé pour créer un univers apaisant et élégant. L’objectif est clair : que les usagers aient envie de monter à bord et s’y sentent bien, comme dans un espace confortable et valorisant. C’est aussi une manière de réconcilier transport public et plaisir du déplacement.
Quelles innovations marquantes avez-vous mises en place récemment pour améliorer le service aux usagers ?
Nous allons lancer une application mobile qui centralise horaires, titres de transport et informations en temps réel. Un service de location de vélos, à moyenne et longue durée, a vu le jour au printemps. Nous avons aussi développé le transport à la demande nocturne, pour couvrir les horaires creux et répondre aux besoins spécifiques des travailleurs de nuit. Enfin, la conciergerie solidaire installée sur le parking relais de l’hôpital Debré illustre bien notre volonté d’aller au-delà du transport : nous créons des lieux de vie utiles. Pour finir, j’insiste sur la billettique et l’utilisation des outils numériques pour améliorer la fluidité des clients aux stations tramway.
Le réseau Grand Reims Mobilités semble accorder une grande importance à l’intermodalité. Pouvez-vous nous en dire plus ?
L’intermodalité est au cœur de notre démarche. La gare de Reims est notre hub principal : elle connecte trains, tramways, bus, taxis, et vélos. L’enjeu est de rendre les parcours fluides, intuitifs et sans rupture. Grâce aux BHNS, aux nouveaux parkings relais et à une billettique modernisée, nous réduisons les frictions dans les trajets quotidiens et favorisons d’autres modes que la voiture individuelle qui restait omniprésente dans les déplacements ruraux.
Si vous deviez résumer en une phrase la philosophie de Grand Reims Mobilités, quelle serait-elle ?
Grand Reims Mobilités, c’est bien plus qu’un réseau de transport : c’est une vision du territoire en mouvement. Nous pensons la mobilité comme un levier d’inclusion, de transformation urbaine et de transition écologique. Chaque ligne, chaque service, chaque innovation vise à améliorer la qualité de vie. C’est une dynamique collective, au service d’un quotidien plus fluide et durable pour tous.
Propos recueillis par Pierre Lancien