François-Rage
François Rage 
Premier vice-président de Clermont Auvergne Métropole en charge des mobilités

« SERM : Notre objectif est de multiplier par deux ou trois le nombre d’usagers du train »

Clermont Auvergne Métropole travaille conjointement avec la Région pour aboutir à un cadencement de ses deux principales lignes de TER dans un contexte budgétaire incertain et contraint. Pour François Rage, premier vice-président de Clermont Auvergne Métropole en charge des mobilités, ce projet de SERM ne doit pas se faire au détriment de l’amélioration de la ligne Intercités Paris-Clermont qui reste “une priorité absolue” pour le territoire.

Mobily-Cités : Quelles sont les caractéristiques du projet de SERM de Clermont-Ferrand ? 

François Rage : Nous projetons d’améliorer la fréquence des trains sur une croix ferroviaire composée de deux lignes : Issoire-Riom et Clermont-Ferrand-Thiers. L’idéal serait d’atteindre un cadencement à la demi-heure. En outre, notre projet de SERM prévoit un travail spécifique autour des gares afin de les transformer en véritables lieux d’intermodalité avec accès aux lignes de bus et aux vélos, à des parkings relais, etc. L’idée est de faciliter le rabattement des habitants des communes rurales sur ces PEM. Notre objectif est de multiplier par deux ou trois le nombre d’usagers du train.

Par ailleurs, le développement de cars express est envisagé pour desservir des pôles qui n’ont pas de ligne ferroviaire comme Billon, commune de 5000 habitants. 

Ce projet est mené avec la Région Auvergne Rhône-Alpes (Aura) qui a défendu notre dossier bien que nous ne disposions pas de la même densité de population que Lyon ou Grenoble, par exemple. Mais, des six projets labellisés SERM en Région Aura, c’est le plus simple à mettre en œuvre, car il ne nécessite pas d’investissements lourds sur les infras comme la réalisation de doublements de voies ou la construction de ponts ou de tunnels. L’effort financier porte essentiellement des coûts de fonctionnement supplémentaires et il faudra certainement prévoir davantage de rames de TER pour son exploitation… 

Quelles sont les prochaines étapes ?

Nous préparons le dossier en vue d’obtenir le statut de SERM, qui permettra d’accéder aux financements de l’État et à l’expertise technique et organisationnelle de la Société des Grands Projets (SGP). Des études sont en cours. La SGP a déjà commencé à nous accompagner sur notre projet : ce dossier, qui doit préciser notamment le plan de financement et la gouvernance, devrait être bouclé en 2025. Nous tablons sur une mise en service du SERM vers 2028-2029. 

Comment la gouvernance des SERM pourrait être organisée ?

La SGP accompagne la Région et le Syndicat mixte des transports de Clermont (SMTC) pour définir le mode de gouvernance le plus adapté. 

 Quels sont les financements prévus ? Quelle sera la part de Clermont Auvergne Métropole ?

La répartition des financements n’est pas encore définitive, mais un accord tacite entre les présidents des différentes collectivités prévoit que l’État contribue à hauteur de 50%, la Région à 25%, le reste sera pris en charge par les AOM proportionnellement au nombre d’habitants. Cependant, nous n’avons pas de visibilité : en effet, le projet de loi de finances 2025 (PLF) ne prévoit pas de budget pour les SERM. En outre, les économies annoncées dans ce PLF affecteront le groupe SNCF comme les collectivités – 4,5 M€ en prélèvements sur ressource en moins pour la Métropole…

 Si les moyens financiers ne sont pas au rendez-vous, remettrez-vous en cause votre projet de SERM ?

Si nous avons à choisir entre la réalisation de ce SERM et l’amélioration de la ligne Paris-Clermont, nous privilégierons la desserte de la capitale. Nous en faisons une priorité absolue d’autant que la liaison aérienne Clermont-Orly a été supprimée : si nous n’avons plus de trains qui fonctionnent correctement, nous serons vraiment au bout du monde ! Or, la durée de trajet pour rejoindre Paris s’est déjà allongée ces dernières années. La livraison des nouvelles rames Alstom, qui doivent remplacer les trains Corail de plus de quarante ans, a été repoussée de trois ans à 2027. En outre, SNCF Réseau doit encore effectuer un certain nombre de travaux pour fiabiliser la ligne comme la suppression de passages à niveau, l’électrification de portions qui ne le sont pas encore, et la pose de grillages pour éviter les accidents avec des sangliers, cette dernière mesure peut paraître anecdotique, mais elle s’avère, en réalité, essentielle sur cette ligne… 

 Comment la Métropole travaille avec les collectivités alentours pour répondre aux besoins de déplacements dans son bassin de vie ?

La Métropole a mis en place deux stratégies dans ce domaine. L’une consiste à proposer aux communautés de communes (CC) qui rencontrent des difficultés à mettre en œuvre leur compétence mobilité, d’adhérer au SMTC. C’est potentiellement le cas de la CC de Mond’Arverne, située au sud de Clermont-Ferrand. Cela se traduirait de fait par un élargissement du périmètre du SMTC. Pour celles qui conservent la gestion de leur réseau de transport, l’autre stratégie repose sur le conventionnement avec ces collectivités afin de mieux ajuster les réseaux entre eux, d’harmoniser la tarification et de créer des titres de transport uniques. Cette méthode présente l’avantage d’être beaucoup plus lisible et fluide pour les usagers. C’est le cas, par exemple, de Riom Limagne et Volcans. Nous avons réfléchi ensemble à une organisation des transports pour desservir, en particulier, la zone d’activité de Ladoux qui accueille notamment le centre de recherche de Michelin et qui est implantée au bord de la Métropole. Nous avons ainsi créé une ligne commune qui dessert cette zone depuis la gare de Riom. Une solution similaire a été mise en place pour la desserte du parc d’attractions Vulcania situé en dehors du périmètre de la Métropole à 5 km près.

Propos recueillis par Florence Guernalec

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