Paris, Lyon, Marseille, Rouen, Strasbourg. Dans ces cinq villes, où les niveaux de concentration de dioxyde d’azote restent supérieurs aux seuils réglementaires, la circulation des véhicules Crit’Air 4 sera interdite au 1er janvier 2024, et celle des Crit’Air 3 au 1er janvier 2025. En rappelant la règle, le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a déçu les tenants d’un moratoire pur et simple concernant l’application des Zones à faibles émissions. A l’issue du Comité ministériel sur la Qualité de l’air en ville réuni le 10 juillet, le gouvernement a donc fait le point sur la situation dans les 11 ZFE prévues par la Loi d’orientation des mobilités, et celles concernant les 42 agglomérations de plus de 150.000 habitants ajoutées par la loi Climat et Résilience. Il en ressort deux catégories de villes: celles qui respectent les seuils, et les autres. Cette nouvelle classification désigne 37 «territoires de vigilance», où les seules restrictions de circulation applicables vont impliquer l’interdiction des véhicules non classés au 1er janvier 2025. Avec toutefois un bémol: les seuils retenus par la réglementation française pourraient être bientôt revus à la baisse, et rebattre les cartes. Quant au chantier concernant l’harmonisation des règles applicables aux ZFE, il reste ouvert jusqu’à la rentrée. La ministre attend les conclusions d’un rapport sur la situation en Europe pour se prononcer.
Un autre rapport lui a été remis par Jean-Luc Moudenc, 1er vice-président de France urbaine, maire de Toulouse et président de Toulouse Métropole, et Anne-Marie Jean, vice-présidente de l’Eurométropole de Strasbourg, avec une série de propositions visant à concilier ZFE et justice sociale. Les principales recommandations sont les suivantes :
- Rendre éligibles aux aides de l’Etat les habitants et les usagers des territoires voisins impactés par la mise en place d’une ZFE, au même titre que ceux habitant sur les territoires de mise en œuvre d’une ZFE
- Doubler les aides de l’État, notamment la prime à la conversion, et les compléter par des aides proposées par les territoires
- Instaurer, avec l’intercommunalité comme pilote, un guichet unique dans le territoire en charge de la mise en œuvre de la ZFE pour permettre un accompagnement de proximité et simplifier les démarches pour les citoyens
- Etendre et garantir le prêt à taux zéro et ajuster le microcrédit afin de rendre quasi systématique l’avance des aides par un organisme financier ou un tiers
- Renforcer les alternatives de mobilité, y compris dans les territoires périurbains
- Financer massivement les mobilités durables, notamment en déplafonnant les versements mobilité
- Proposer une autorisation de circulation jusqu’en 2030 pour les véhicules Crit’Air 0, Crit’Air 1 et Crit’Air 2 pour les poids lourds et les véhicules utilitaires légers
- Faciliter le leasing social
- Instaurer des dérogations « petit-rouleur »
- Faire évoluer la vignette Crit’Air afin que soit prise en compte la réalité des polluants atmosphériques et pas uniquement l’âge du véhicule.
Les métropoles demandent notamment un renforcement des moyens dont elles disposent pour développer l’offre de mobilité alternative à l’auto-solisme, via notamment une hausse du versement mobilité. C’est aussi pour se donner le temps de construire une meilleure offre de transport public et désamorcer la «bombe sociale» que le sénateur Philippe Tabarot a déposé une proposition de loi prévoyant le report à 2030 de l’interdiction des véhicules Crit’Air 3 dans les agglomérations de plus de 150.000 habitants.
Sandrine Garnier