Saisie par l’Autorité de la concurrence (ADLC) en décembre dernier, l’Autorité de régulation des transports (ART) a rendu un avis plutôt mitigé sur la situation du secteur des transports terrestres de personnes. La démarche de l’ADLC vise à faire le bilan sur les conditions effectives de la mise en concurrence dans les transports conventionnés et non conventionnés. Tout d’abord, concernant le transport ferroviaire et la séparation du gestionnaire d’infrastructures (SNCF Réseau) et de l’exploitant (SNCF Voyageurs), l’ART considère ainsi que «la séparation fonctionnelle de SNCF Réseau mériterait d’être finalisée» et ses garanties d’indépendance «renforcées». L’ART fait également part de ses «interrogations» sur les conditions de financement au sein du groupe SNCF, la holding de tête étant l’émetteur d’obligations pour l’ensemble du groupe. En outre, «le financement des investissements de renouvellement de l’infrastructure repose, en partie, sur un fonds de concours de l’État alimenté par les dividendes en provenance de l’ensemble des filiales du groupe SNCF». Le contrat de performance signé entre l’Etat et SNCF Réseau pour 2021-2030 stipule d’ailleurs que 20% des investissements envisagés en 2030 (4 570 M€) soient financés par le fonds de concours (910 M€). Si l’ART considère que des avancées ont été effectuées en matière de régulation tarifaire suite aux recommandations de l’ADLC, le constat est très différent sur l’accès des nouveaux opérateurs aux installations de service, et sur leurs difficultés à acquérir du matériel roulant, neuf ou d’occasion, «susceptibles de créer une barrière à l’entrée».
L’ART pointe aussi «les risques de retard et de non-respect des échéances prévues pour l’ouverture à la concurrence des services conventionnés». Retards dont les causes sont multiples, et pas uniquement imputables à l’opérateur historique. Sur la mise en concurrence des TER, les délais des procédures et les moyens nécessaires s’avèrent plus importants qu’attendus et pèsent sur les capacités des équipes régionales. Du côté des opérateurs potentiels, la réponse aux appels d’offre nécessite aussi des moyens humains et financiers qui ne sont pas à la portée de tout le monde. L’ART redoute «un risque de quasi-absence d’ouverture effective du marché».
Les transports guidés en Ile-de-France figurent aussi dans la liste de l’ADLC. Sur ce point, l’ART rappelle que sa compétence porte uniquement sur la rémunération de la RATP en tant que GI et gestionnaire technique (mainteneur). Mais elle souligne l’enjeu spécifique attaché au Grand Paris Express : «pour que la concurrence pour le marché soit effective, il convient que la RATP, dans le cadre de ses activités de gestionnaire technique […] ne puisse en aucune manière privilégier les services de transport qui seraient exploités par la RATP. Or, même s’il existe un plan de gestion des informations confidentielles en vigueur au sein de la RATP, ayant fait l’objet d’un avis conforme de l’Autorité, les activités de gestionnaire technique d’infrastructure et les activités d’opérateur de transport sont hébergées au sein du même établissement public et ne font pas l’objet d’une séparation fonctionnelle robuste en interne».
S. G.