Comment convaincre les automobilistes de renoncer à leur voiture pour emprunter les transports publics? La 10e édition de l’Observatoire de la mobilité tente de répondre à cette question, en auscultant les choix de déplacements dans les villes de plus de 20.000 habitants. L’enquête menée par l’Ifop pour l’UTP met en évidence les principaux critères de choix: sécurité (pour 78% des sondés) et rapidité (77%), devant le coût (69%). Un trio de tête qui profite encore largement à la voiture, utilisée par 51% des personnes interrogées dans leurs déplacements des 12 derniers mois, contre 35% pour les transports publics et 47% pour les modes actifs. Premier enseignement: la tarification à elle seule n’est pas un levier suffisant.
Autre enseignement de l’étude: pour attirer les non-utilisateurs des transports publics, l’accès au réseau est déterminant, et la présence d’un mode lourd plus attractive que celle d’une ligne de bus. D’où la pertinence des Services express régionaux métropolitains (SERM) que le Chef de l’Etat veut développer. Mais les 700 M€ annoncés pour 13 projets ne suffiront pas à créer le choc d’offre attendu par les AOM et les opérateurs, qui demandent 500 M€ de soutien annuel aux transports urbains. Le protocole d’accord financier signé le 26 septembre entre l’Etat et la région Ile-de-France fait figure de modèle à suivre, en particulier sur l’augmentation du versement mobilité. A supposer que ce qui fonctionne à Paris et en petite couronne puisse être dupliqué partout ailleurs…
Toute la difficulté consiste à aller chercher des usagers en dehors des centres des grandes métropoles, où «les transports en commun représentent seulement 11% du total des kilomètres effectués», souligne Thierry Mallet, président de Transdev. «Plus de 20% des automobilistes se déclarent non-dépendants de la voiture», relève quant à elle Marie-Ange Debon, présidente de l’UTP et de Keolis. Ces automobilistes-là seraient donc prêts à se convertir aux transports publics? Pas si sûr: une autre étude, rendue publique par Transdev la semaine dernière, montre notamment que dans les périphéries urbaines, le vélo progresse alors que les bus et les cars perdent des passagers… la solution, pour les transports publics, consiste peut-être à intégrer la voiture, ou plus précisément ses usages partagés, covoiturage quotidien et autopartage, comme le rappelle Marc Delayer, président du GIE Objectif Transport public.
Le covoiturage du quotidien fait d’ailleurs déjà partie des politiques publiques de mobilité, et peut même répondre à des besoins de rabattement. La distance aux arrêts, au départ comme à l’arrivée, fait d’ailleurs partie des principaux freins cités à l’utilisation des transports publics, pour 42% des automobilistes, avec le temps de trajet (46%) et les contraintes horaires (39%). Selon l’étude Ifop réalisée pour l’UTP, le contexte d’inflation, de crise énergétique et d’urgence climatique pourrait pousser 35% des automobilistes à envisager le report modal. A fortiori en cas d’amélioration de l’offre de transports publics (52%) ou d’alourdissement des contraintes à la circulation automobile (47%). Et si l’on combine les deux, le potentiel grimpe à 63%.
Sandrine Garnier