Hall de la gare de Strasbourg

SERM: «Il ne faut pas tout attendre de l’Etat», prévient le ministre des Transports, Patrice Vergriete

14 03 2024 | Actualités

«Les SERM doivent permettre de mieux maîtriser la dynamique de métropolisation dans notre pays. Mais c’est au politique de définir les pôles d’équilibre de la région métropolitaine, ce n’est pas à l’Etat de le dire», a déclaré Patrice Vergriete, ministre des Transports, lors du colloque du Gart organisé à Bordeaux sur les Services express régionaux métropolitains (SERM), le 13 mars. Utiliser ces services de mobilité comme un outil d’aménagement du territoire, fait consensus parmi les élus: «Les SERM doivent offrir une réponse globale et ambitieuse pour corriger les déséquilibres entre les territoires urbains et ruraux, et être un vecteur de lutte contre les inégalités», a souligné Jean Galand, vice-président du conseil départemental de la Gironde en charge des Mobilités.

«L’Etat est là pour fixer les objectifs et sera au rendez-vous», a assuré Patrice Vergriete. Mais depuis les annonces du chef de l’Etat de novembre 2022 sur la réalisation 13 RER métropolitains, le soufflé est retombé. «Ne tournons pas autour du pot: j’ai compris qu’il n’y aurait pas le milliard par SERM annoncé. Nous allons les financer avec l’endettement des collectivités !», a déclaré Renaud Lagrave, vice-président de la Région Nouvelle Aquitaine en charge des Mobilités, faisant référence au Livre blanc publié par la SGP et SNCF Réseau qui évoque «la pertinence de la mobilisation d’un modèle fondé sur un endettement».

Le ministre des Transports a confirmé l’organisation de la conférence nationale de financement avant le 30 juin 2024, comme l’exige la loi du 27 décembre 2023 relative aux SERM, mais sans donner de date. «Je souhaite que nous rentrions vraiment dans le débat pour parvenir à des décisions conclusives sur le modèle économique de la mobilité en France, a expliqué le ministre, évoquant plusieurs pistes comme des taxes affectées et un déplafonnement du VM. Je proposerai prochainement au Premier ministre de lancer une mission IGF-IGEDD pour mieux identifier les besoins, notamment en termes d’investissement et d’accompagnement de l’Etat.» A ce jour, 760 M€ sont prévus pour les SERM dans le cadre des CPER.

Entre temps, Patrice Vergriete a annoncé réunir, à la mi-avril, l’ensemble des représentants des métropoles et des AOM, pour parler officiellement calendrier: «Nous allons sans doute fonctionner en deux temps: identifier les premières labellisations au cours de ce premier semestre 2024, c’est-à-dire sélectionner les projets déjà avancés qui sont compatibles avec les principes politiques énoncés par l’exécutif. Ensuite, un travail plus fin sera conduit avec les services de l’Etat pour parvenir à l’arrêté définitif. J’espère avoir des arrêtés définitifs avant la fin de 2024 pour pouvoir enclencher la procédure…» 

Le ministre des Transports considère néanmoins que c’est aux collectivités locales de s’emparer du sujet: «Il ne faut pas tout attendre de l’Etat. Il est possible d’imaginer l’esprit et la philosophie du SERM sans l’Etat». Plusieurs élus métropolitains et régionaux ont souligné qu’ils n’avaient pas attendu les annonces de l’exécutif pour travailler sur des projets de SERM, à l’instar de Bordeaux, Strasbourg ou encore de la Région Sud.
«Il ne faut pas attendre le grand soir: si l’objectif est d’obtenir tel niveau d’investissement et de fonctionnement, on n’y arrivera pas. Cela nous impose de commencer avec l’existant», a souligné Alain Jund, vice-président de l’Eurométropole de Strasbourg (EMS) en charge des Mobilités. L’EMS avait été la première collectivité a lancer, en décembre 2022, un RER métropolitain avec la Région Grand Est. Résultat: des débuts chaotiques avec un choc d’offre promis par la SNCF qui n’était pas au rendez-vous.
Matthieu Chabanel, PDG de SNCF Réseau, a également prôné une démarche pragmatique. Il a appelé à sortir de «la fascination des grands projets» pour procéder par étapes intermédiaires et ne pas d’attendre 10-15 ans la mise en service des SERM: «Cela passe par une transformation culturelle de SNCF Réseau», a-t-il admis.

Une envie d’autonomie

La gouvernance des projets de SERM fait également partie des sujets critiques. François Durovray, président du département de l’Essonne, a salué la méthode utilisée par la région Nouvelle-Aquitaine pour travailler sur le SERM de Bordeaux, avec la création du syndicat Nouvelle-Aquitaine Mobilités qui rassemble les différentes collectivités du territoire. En outre, un espace commun permet de se coordonner entre le syndicat mixte et les différentes entités du groupe SNCF. Nouvelle-Aquitaine Mobilités est ainsi le chef de file d’un projet qui comprend la mise en service de cars express. «C’est l’occasion de réconcilier Régions, métropoles et interco. Le Syndicat Nouvelle-Aquitaine Mobilités a montré la voie, et a notamment voté le VM additionnel pour financer le service de cars express…», a expliqué  François Durovray.

Néanmoins, des collectivités ont exprimé le souhait de prendre leur autonomie par rapport à l’opérateur historique. Gérard Chausset, président de la commission transports de Bordeaux Métropole & vice-président délégué SERM (représentant les Métropoles) du Gart, a souligné l’importance pour une collectivité de disposer de sa propre expertise ferroviaire: «La gouvernance des SERM doit pourvoir dialoguer d’égal à égal avec la SNCF, car sa vision est tributaire de contraintes sociales…» Pour les élus, il est ainsi important d’imposer leur politique au service des citoyens: «Les projets de SERM viennent du local, du bas. C’est nouveau !», a insisté Gérard Chausset.

La gouvernance se joue aussi au niveau de la maîtrise d’ouvrage (MOA), selon Jean-François Monteils, président du directoire de la SGP, soulignant que la loi du 27 décembre 2023 relative aux SERM a fait émerger la notion de «coordination des maîtrises d’ouvrage». La SGP se positionne ainsi comme «une maîtrise d’ouvrage intégrée» qui rassemble les expertises juridiques, techniques, sur les relatons territoriales et l’intermodalité. «Nous sommes en train de renforcer notre expertise sur l’infra pour la mettre à disposition des territoires…», a expliqué Jean-François Monteils, qui présente la SGP comme complémentaire de SNCF Réseau. Ce dernier a également souligné que la gouvernance de la MOA passe aussi par la transparence des données pour rendre compte de l’évolution des projets…

Florence Guernalec

 

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