«Le texte adopté par la Commission [de l’aménagement du territoire et du développement durable] est équilibré, pragmatique et permet des avancées concrètes pour nombre de nos concitoyens», a résumé le sénateur Jacques Fernique (groupe GEST), rapporteur de la Proposition de loi (PPL) visant à favoriser le réemploi des véhicules au service des mobilités durables et solidaires sur les territoires. Concrètement, ce texte vise à autoriser les AOM à réemployer les véhicules éligibles à la prime à la conversion les moins polluants, afin qu’ils puissent être mis à disposition des ménages en situation de précarité, via des services de location sociale et solidaire. Cette proposition de loi de Joël Labbé (aujourd’hui ex-sénateur GEST) a été votée à l’unanimité le 29 novembre 2023 en Commission, et sera discutée dans la foulée en séance publique le 13 décembre.
Jacques Fernique a souligné un «paradoxe» et un «gaspillage» de ces véhicules mis au rebut lors de la présentation de son rapport le 6 décembre 2023: d’un côté, les garages solidaires et les services de mobilité solidaire des collectivités manquent aujourd’hui de véhicules pour répondre à la demande, alors qu’au même moment, des voitures peu polluantes sont mises à la casse dans le cadre de la prime à conversion. De l’autre, 4,3 millions de Français n’ont aucun équipement individuel ou abonnement à un service de transport collectif, selon le Baromètre des mobilités du quotidien publié par la Fédération pour la nature et l’homme (FNH) et Wimoov en mars 2022.
Les sénateurs expliquent que le dispositif retenu est rapidement opérationnel: «Ce texte s’appuie sur l’existant», a ainsi souligné le sénateur Guillaume Gontard, co-auteur de la PPL (GEST). En effet, la LOM prévoit que les AOM sont compétentes pour «organiser des services de mobilité solidaire» afin d’améliorer l’accès à la mobilité des personnes se trouvant en situation de vulnérabilité. En clair, cette PPL permettra aux AOM volontaires de devenir propriétaires à titre gracieux de ces véhicules peu polluants destinés originellement à la casse et de les proposer aux ménages en précarité mobilité via des associations spécialisées comme des garages solidaires, qui existent déjà sur le territoire.
Plusieurs amendements adoptés en Commission ont permis de tenir compte de l’avis de la DGEC (Direction générale de l’énergie et du climat): les véhicules diesel sont ainsi écartés et seuls les véhicules essence classés Crit’Air 3 ou moins, sont éligibles. Cela représente un potentiel d’une dizaine de milliers de véhicules par an, selon Jacques Fernique. Par ailleurs, le texte amendé prévoit la signature de conventions entre les AOM et les parties prenantes afin de clarifier les responsabilités des acteurs notamment sur les modalités de collecte et de remise des véhicules, les conditions de retrait de la circulation et de destruction des véhicules à l’issue de leur période d’utilisation.
Ce texte prévoit en outre que ce dispositif fera l’objet d’une évaluation trois ans après son entrée en vigueur: il s’agira notamment de mesurer les impacts sanitaires et environnementaux et, le cas échéant, de réviser les critères d’éligibilité et modalités de mise en œuvre. Enfin, s’appuyant sur le plan d’action national en faveur du rétrofit lancé en avril 2023, la PPL prévoit que le gouvernement devra remettre un rapport au Parlement sur les mesures qui permettraient de favoriser le développement du rétrofit en faveur des services de mobilité solidaire. Une réponse à l’entrée en vigueur des ZFE, rebaptisées par leurs détracteurs, des «zones à forte exclusion».
Florence Guernalec