HATZIG_PATRICK
Patrick Hatzig
Vice-président du Grand Nancy

« Le Serm, ce sera du ferroviaire mais aussi beaucoup de cars express »

Alors que Nancy se prépare à mettre en place son trolley, Patrick Hatzig conseiller municipal de Nancy et vice-président de la métropole explique en quoi le projet de RER métropolitain doit permettre de mieux irriguer les territoires voisins. 

Mobily-Cités : Vous êtes en passe de finir de tourner la page du TVR, à quand la mise en service du trolleybus ?

Patrick Hatzig : L’horizon s’éclaircit. Les rames auront toutes été livrées en décembre, la ligne aérienne de contact sera posée à la mi-décembre, nous pourrons effectuer des marches à blanc et des formations des conducteurs pour une mise en service début 2025. Le trolleybus 100% électrique est une solution choisie et assumée en tenant compte des contraintes budgétaires. Nous avions l’obligation d’abandonner le TVR (transport sur voie réservée, tram sur pneus guidé avec rail central), le STRMTG nous ayant demandé de stopper son exploitation le plus rapidement possible. La Métropole n’avait pas la capacité financière pour s’offrir un tramway classique avec au moins 3 ans de travaux qui auraient excédé les 500 millions d’euros d’investissement prévus dans notre Plan Métropolitain des Mobilités (P2M) lequel englobe les projets de tous les modes de déplacement jusqu’en 2032. Le trolleybus présente une solution intermédiaire pour la ligne 1 du réseau, environ 5 fois moins cher et qui sera mise en service 2 ans après l’arrêt du TVR. Cette solution est aujourd’hui regardée par un certain nombre de villes.

 

Dans quelle mesure la capacité du réseau s’en trouvera-t-elle améliorée ?  

Les rames Hess de 24 mètres offrent une capacité de 154 voyageurs contre 136 pour le TVR. La capacité sera d’autant plus importante avec une fréquence visée de 5’ min contre 8’ grâce à une meilleure vitesse commerciale. De 282 départs en une journée, nous pourrons passer à 408 départs, portant la capacité théorique à plus de 60 000 voyageurs, soit un gain de 15 à 20 000 personnes par jour. Cette sorte de colonne vertébrale va redynamiser le réseau et ses 3 autres lignes structurantes, complétées par une nouvelle ligne 5. Elles cohabiteront sur une partie de la plateforme en site propre.

Rétrospectivement, que vous inspirent les difficultés actuelles du constructeur Van Hool ?

Nous ne sommes pas mécontents de notre choix sachant qu’il existait sur le marché trois solutions de trolleybus de 24 mètres tout électrique : Solaris mais qui n’avait pas répondu, Van Hool qui avait répondu mais qui aujourd’hui abandonne le matériel urbain. Hess était un petit peu plus coûteux mais répondait à la fiabilité d’un matériel éprouvé dans plusieurs villes en Europe, et aux enjeux de délais. 

 

L’arrivée du trolleybus entraine des effets sur la durée du contrat avec Keolis, pourquoi ?

Comme dans la plupart des collectivités, la DSP a été prolongée d’un an, jusqu’à fin 2025, en raison du COVID et nous avons étudié un report supplémentaire d’une année, car 2025 n’apportera pas suffisamment de recul pour bâtir un cahier des charges tenant compte au plus près de l’effet du trolleybus sur le trafic du réseau. La procédure sera lancée à l’automne 2025 pour un nouveau contrat effectif tout début 2027.

 

En attendant, quelles conséquences les travaux ont-ils produit sur la fréquentation du réseau ? 

L’effet TVR en fin de vie, les travaux couplés au réseau de remplacement ont évidemment limité la reprise du trafic après le COVID, qui reste en deçà de celui de 2019. Un certain nombre de voyageurs se sont mis au vélo, beaucoup d’autres à la marche, Nancy étant propice à cette pratique, d’autres se sont repliés sur la voiture. Nous prévoyons évidemment un rebond avec le P2M. Le réseau de remplacement nous a par ailleurs permis de tirer des enseignements. Nous allons pérenniser la ligne est-ouest pour un trajet gare – plateau de Brabois et Technopôle, qui fonctionne tous les jours sauf pendant les vacances scolaires. A la suite de discussions avec l’ensemble des communes de la Métropole, nous allons lancer le réseau 2025 qui améliorera des fréquences de certaines lignes pour répondre à la demande.

 

Après la ligne de trolleybus (Tempo 1), où en est le rythme de déploiement des autres lignes de BHNS prévues dans votre plan métropolitain des mobilités ?

La concertation concernant la transformation en BHNS des lignes Tempo 2, 3, 4 et 5 a commencé afin de programmer les travaux à partir de 2026/2027. Dès 2025 nous créerons une ligne Tempo 5 sur un axe nord-sud qui n’était pas suffisamment pris en compte alors que les déplacements et flux y sont importants. Elle partira d’un parking relais au nord de l’agglomération, à Maxéville, pour rejoindre le centre-ville de Nancy et passera par Vandœuvre pour arriver sur Roberval, lieu qui sera doté d’une halte ferroviaire dans quelques années. Nous prévoyons dans l’avenir un mode électrique pour cette ligne. Ce déploiement suit donc son cours comme prévu au P2M et dans les prévisions budgétaires.

 

Le résultat des dernières élections montre un fort vote RN dans les communes éloignées périphériques. Faut-il y voir un effet pervers de la politique de la métropole visant à dissuader l’accès au centre en voiture ?  

Le fait que le RN ait marqué des points dans les communes périphériques de Nancy est un fait nouveau, qu’il faut placer dans un phénomène national. On ne peut pas dire que les électeurs aient fait ce choix parce qu’ils seraient mal reliés à la ville-centre, ou dissuadés d’y venir en voiture, au regard de l’offre de parking en ouvrage dont nous disposons en ville. Nous avons des lignes et des liaisons de bus gérées avec 3 intercommunalités voisines, et on peut dans la métropole toujours se déplacer en transports en commun, les trajets excédant rarement une demi-heure, il n’y a pas de territoire abandonné sur la Métropole. Je ne vois pas de mécontentement issu de la question des transports.

 

En matière de SERM, comment avance votre projet ?

Le projet de SERM Lorraine-Luxembourg a été labellisé par le gouvernement fin juin. Il concerne Metz et Nancy sur le sillon lorrain, dont la taille de 100 000 habitants chacune justifie de n’avoir qu’un seul SERM. Il aura une vocation transfrontalière pour la Lorraine du nord et sera tourné vers des territoires moins denses, autour du Grand Nancy et la Lorraine du sud, qui elle a des enjeux importants de liaison ferroviaire vers Lyon et le sud de la France. La labellisation permet d’approfondir les études et devrait conduire fin 2024 à l’obtention de l’appellation de SERM. 

 

Quelle sera la part du rail et celle du car dans ce SERM ? 

L’étoile ferroviaire à 6 branches de Nancy est un atout pour le SERM mais elle ne permet toutefois pas de desservir tous les territoires. On se rend compte par ailleurs dans les discussions avec les élus du Sud mosellan qu’on ne peut pas tout miser sur le TER car à un moment donné, le coût de fonctionnement devient difficile à assumer. Le SERM, c’est du ferroviaire mais c’est aussi beaucoup de cars express. Il appartient à chaque AOM de prendre ses responsabilités pour organiser des rabattements vers les hubs routiers en correspondance avec les cars express ou haltes ferroviaires. Ces lignes peuvent être très vites opérationnelles.

 

Quelle serait la part prise en charge par le Grand Nancy ?

La Région est chef de file des mobilités dans le bassin de mobilité sud 54, il appartiendra à chacun de participer à la réalisation des infrastructures d’accueil, de pôle multimodaux, parking-relais, nos lignes structurantes de la Métropole devenant des lignes de prolongement et d’accueil vers les centres métropolitains.

 

Où en êtes-vous de la ZFE-m ? 

Sa mise en place au 1er janvier 2025 ne concernera que les poids lourds et véhicules utilitaires non classés et Crit’air 5. La 2e phase arrivera en 2028 car la qualité de l’air actuelle et ses projections d’évolutions sont assez satisfaisantes, et concernera les véhicules particuliers avec les mêmes niveaux d’interdictions (NC et Crit’air 5). Toutefois la Métropole veille à continuer à améliorer la qualité de l’air, et à concilier les enjeux de transition écologique et de justice sociale, avec des mesures d’accompagnement comme le conseil à la mobilité, les dérogations et les aides financières au changement de mobilité ou à la conversion et aux mobilités alternatives.

 

Propos recueillis par Marc Fressoz

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