«Ce train à batteries va permettre de réduire jusqu’à 85% les émissions de CO2 par rapport à un train diesel», affirme Jean-Aimé Mougenot, directeur TER délégué SNCF Voyageurs, lors de la présentation du tout premier TER à batteries Alstom-SNCF aux RNTP à Clermont-Ferrand, le 18 octobre. Cette innovation, conçue à partir de rames AGC à mi-vie (15-20 ans), consiste à remplacer le moteur diesel de ces trains bi-modes par des batteries lithium d’une puissance de 800 kW afin de rouler sur les voies non électrifiées du réseau ferré. Alstom et SNCF Voyageurs affichent une autonomie de 80 km pour ces TER qui pourront rouler jusqu’à 160 km/h. Un projet d’expérimentation rendu possible grâce à un protocole passé avec cinq Régions en 2020: l’année suivante, Auvergne-Rhône-Alpes, Hauts-de-France, Nouvelle-Aquitaine, Occitanie et Sud signaient un contrat de commande pour cinq rames et mettaient 28,7 M€ sur la table pour un budget total de 40,2 M€, soit 5,74 M€ par Région, Alstom apportant 5,5 M€ et SNCF 6 M€. «Un rein», comme l’a souligné Renaud Lagrave, vice-président en charge des mobilités de la Nouvelle-Aquitaine, qui espère que d’autres Régions vont les rejoindre et qui aimerait que celles-ci soient davantage accompagnées…
Le marché potentiel n’est pas négligeable. «Sur les 700 rames AGC en circulation, plus de 300 sont éligibles à ce type de modification», a expliqué Jean-Baptiste Eyméoud, président d’Alstom France. Un enjeu industriel et financier pour la France, qui compte au total 1200 matériels diesel ou bi-mode…» Luc Laroche, directeur de programme innovation système ferroviaire du groupe SNCF, estime d’ailleurs que le parc diesel a vocation à long terme a être converti aux deux-tiers en trains à batteries et un tiers en trains à hydrogène. La toute première rame AGC de Nouvelle-Aquitaine sortie de l’usine Alstom de Crespin se trouve aujourd’hui au centre d’essais ferroviaires de Bar-le-Duc afin d’entamer la phase des essais dynamiques durant quatre à cinq mois. Quatre autres rames doivent suivre. SNCF Voyageurs espère obtenir l’homologation de l’EPSF fin 2024, puis démarrer le service commercial dans la foulée pour un déploiement en 2025 si l’expérimentation est concluante.
Entretemps, l’année 2024 va être mise à profit pour former le personnel de conduite, celui chargé de la maintenance et des centres opérationnels. «La maintenance coûtera moins cher à l’usage» a d’ailleurs souligné Jean-Baptiste Eyméoud, sans toutefois indiquer de chiffre. Ce train à batteries ne nécessitera pas d’investissements lourds sur l’infrastructure mais des aménagements pour le recharger à l’arrêt en gare ou sur quelques kilomètres de caténaires. Renaud Lagrave a admis être encore en discussion avec SNCF Réseau pour installer des stations de recharge sur quelques lignes: «Nous espérons que leur mise en service sera concomitante avec l’arrivée des trains à batteries…» La question du coût du rétrofit de ces rames demeure également en suspens: «Ce chiffrage reste à faire, a admis Jean-Baptiste Eyméoud. Nous allons y travailler avec nos fournisseurs pour connaître les coûts et les délais de production des batteries, et savoir à quel rythme et à quel coût nous pourrions déployer ce rétrofit sur un parc de trains beaucoup plus large.»
Florence Guernalec