Avec l’arrivée de sa première benne à ordures ménagères à hydrogène, Dijon Métropole marque une étape majeure dans la décarbonation de sa flotte de véhicules lourds. Le plan ambitieux présenté en 2018 visait à mettre en place un écosystème complet, de la production d’hydrogène vert à la consommation, en élargissant l’usage aux bus urbains. «Nous avons fait le pari de l’hydrogène pour enclencher une chaîne d’innovation, et nous avons choisi de commencer par le traitement des déchets. Même si ça ne fait pas vraiment rêver, c’est essentiel pour la réussite du projet», déclare François Rebsamen, président de Dijon Métropole. Un pari sur l’avenir et le développement des technologies, qui a déjà valu quelques années de retard au déploiement des équipements et à la mise en service des véhicules. La crise sanitaire d’abord, les tensions sur les matières premières et les composants ensuite, ont reporté l’ensemble d’environ 2 ans. Les choix opérés par les élus dijonnais n’en restent pas moins pertinents. Ainsi, la priorité donnée à la production locale d’énergie et aux renouvelables, affirmée dès la mise en service du tramway, permet à la collectivité de conserver une (relative) maîtrise des coûts. L’hydrogène vert sera produit grâce à l’électricité issue de la co-génération et va alimenter les bennes à ordures destinées à la collecte des déchets. 4 BOM à hydrogène seront en circulation d’ici 2026. Elles ont été rétrofitées à neuf par e-Trucks à partir d’un châssis DAF équipé d’une pile à combustible Proton et de batteries Forsee Power. «La PAC est utilisée comme prolongateur d’autonomie, et se met en route dès que la charge des batteries descend en-dessous de 75%», précise Michel Albrand, directeur du développement chez e-Trucks, qui a déjà commercialisé plus de 40 BOM hydrogène aux Pays-Bas, en Belgique ou en Allemagne. Quant aux 42 BOM de Dijon Métropole, elles seront converties au fur et à mesure des renouvellements.
Dijon va ensuite passer à la conversion de ses bus urbains. 16 véhicules standard à hydrogène ont été commandés au constructeur belge Van Hool. Les premiers sont attendus au mois de mai prochain. A terme, une deuxième station de production d’hydrogène de 2 MW sera lancée sur le site du dépôt de bus et tramways, et un nouvel appel d’offres doit être lancé pour une dizaine de bus articulés supplémentaires. Au-delà, les élus se disent ouverts aux futures évolutions technologiques concernant la totalité du parc Divia de 180 véhicules. La Métropole a prévu de consacrer jusqu’à 100 M€ à ces projets d’ici à 2030 afin de réduire son empreinte carbone. La première tranche, qui couvre l’acquisition des 8 BOM et 16 bus nécessite plus de 24 M€, dont 15 M€ uniquement pour la station de production. Malgré les soutiens de l’Ademe (12,3 M€), de la Région, de l’Union européenne et de la Banque des Territoires, la capitale de la Bourgogne ne risque-t-elle pas de payer cher son engagement pionnier? Le président de la métropole lance un appel aux pouvoirs publics, dont l’aide est indispensable pour développer la filière. «Il faut considérer l’équilibre économique global des services. Si nous avions choisi des BOM électriques, il nous aurait fallu davantage de véhicules pour assurer le même service. Idem pour les bus. Et n’oublions pas l’impact sanitaire et social des émissions de CO2», souligne Jean-Patrick Masson, vice-président en charge de la Transition écologique. Les émissions évitées grâce aux BOM hydrogène représentent l’équivalent de 10 trajets aériens Dijon – New York pour une famille de 4 personnes. Quant au différentiel de prix entre le kilo d’hydrogène et le litre de diesel, «il va se réduire avec l’application de la TIRUERT», remarque Michel Albrand.
Sandrine Garnier