« Nos clients et notre personnel sont les actifs les plus importants de l’entreprise »
Alors que le groupe fête son centenaire en 2025, son président Jean Bacqueyrisses démontre que l’entreprise qui mise sur ses talents, reste à l’affût de nouvelles opportunités comme le rétrofit et l’IA, et développe même des innovations brevetées qui équipent autobus et autocars.
Mobily-Cités : Le groupe Bacqueyrisses couvre l’ensemble des métiers du bus et de l’autocar – de la vente de véhicules neufs et d’occasion à leur réparation en passant par leur équipement et leur rénovation, la distribution de pièces détachées ou encore la location de véhicules. Quelles sont les autres singularités de votre groupe ?
Jean Bacqueyrisses : Nous sommes implantés en Nouvelle-Aquitaine et en Occitanie. Bacqueyrisses compte 120 collaborateurs. En 2024, le groupe a réalisé un chiffre d’affaires de 46 M€, environ la moitié provient de la vente d’autobus et autocars – ce qui explique qu’il existe d’importantes variations de CA d’une année à l’autre. Les pièces détachées, puis l’atelier dédié à la maintenance et à la réparation, sont les deux autres piliers de notre activité.
Le groupe Bacqueyrisses célèbre ses 100 ans cette année. Comment expliquez-vous cette longévité ?
Par notre fidélité et attachement à nos clients et à notre personnel, qui sont, à nos yeux, les actifs les plus importants de l’entreprise. Nous sommes aussi restés fidèles à nos partenaires. A cela s’ajoutent évidemment la compétence et l’expérience de nos équipes dans notre domaine : par exemple, nous faisons partie des rares entreprises à être capable de reconstruire des véhicules partiellement détruits…
Au démarrage de cette entreprise, il y a Gabriel Bacqueyrisses…
Mon grand-père était un passionné de mécanique qui a couru les 24 heures du Mans en 1924. Il était officier mécanicien dans la Marine nationale et professeur de mécanique. Il a profité du grand boom de l’automobile. À l’époque, nous possédions le plus grand garage de Bordeaux, un espace de 3300 m² qui servait également de parking, ce qui facilitait la vente de voitures…
Depuis, votre groupe a traversé plusieurs tempêtes…
En effet, une succession n’est jamais évidente c’était le cas de mon père Pierre encore étudiant qui a dû reprendre la direction à la mort prématurée de son père Gabriel a 56 ans. Même si mon père m’a transmis une entreprise très saine lorsque je l’ai reprise fin 1983, j’ai été confronté à une grève du personnel de trois semaines… Nous avons aussi connu des moments difficiles comme la perte successive de nos deux plus gros clients, la création d’une concession concurrente sur notre territoire et la perte de plusieurs collaborateurs. Dernière épreuve en date, en 2015, nous avons tout perdu dans l’incendie de notre entrepôt. Mais nous sommes parvenus à assurer la continuité du service client en utilisant notamment nos vieux autocars comme bureau, et à revenir dans des locaux tout neufs à Bruges, 9 mois seulement après. Cet événement a soudé les équipes et a donné une confiance exceptionnelle à nos collaborateurs et nos clients. Tout ceci grâce aussi à l’action de Pierre-Marie Gaillon notre directeur général depuis 2006 et à son équipe.
Vous avez aussi misé sur l’innovation…
Nous avons créé, un bureau d’études dès 2002, et nous avons eu la chance d’avoir à sa tête, Giovanni Nieddu, un Géo Trouvetou qui nous a permis de développer et de breveter différents systèmes dont l’ECG économiseur d’énergie et ClimCool, un système économique d’air conditionné pour les autocars. Nous avons aussi mis au point NoOne, un système d’alerte qui évite d’oublier des personnes dans les véhicules, et qui a ensuite été adapté pour détecter le vol de carburant.
Plus récemment, Bacqueyrisses a développé une solution innovante pour les malentendants qui vous tient particulièrement à coeur…
Tout à fait, car je suis moi-même malentendant. Notre système AudioBack permet d’entendre les messages d’information et de sécurité directement dans sa prothèse auditive, grâce à une boucle magnétique située sur les têtières amovibles de sièges qui atténue ou élimine les bruits extérieurs parasites.
Votre groupe est aussi engagé, depuis 2024, dans la conversion d’autocars diesel en véhicules électriques avec Retrofleet…
En effet, nous réalisons le rétrofit de véhicules dans nos ateliers, et nous sommes également chargés de la promotion et de la commercialisation de leur kit de conversion. Nous avons commencé les formations de nos techniciens fin 2024 et avons déjà sept conversions pour la région Nouvelle Aquitaine et Occitanie programmées pour 2025, avec pour ambition d’en réaliser 20 par an. Le rétrofit est un levier formidable pour accélérer l’électrification du parc roulant existant en plus de l’achat de véhicules neufs Iveco bus.
Actuellement, le seul modèle homologué est le Crossway d’Iveco qui est le plus répandu. Les batteries sont calibrées pour une autonomie d’environ 200 km, ce qui correspond au maximum parcouru quotidiennement par un véhicule scolaire, ce qui permet d’optimiser, grâce à leur taille, le nombre de passagers et le temps de recharge. Etant donné qu’il y a environ 45 000 cars scolaires en circulation dont 50% sont des Iveco, nous sommes convaincus que le potentiel de conversion reste important.
Bacqueyrisses investit également dans l’IA pour améliorer sa performance opérationnelle…
Nous cherchons à l’utiliser intelligemment. Nos études actuelles se concentrent sur l’industrialisation de nos process, notamment pour la conversion de véhicules, afin d’optimiser le temps et de rationaliser les tâches. Nous voulons aussi l’appliquer à l’organisation du travail, par exemple en rationalisant les déplacements de nos équipes. Un autre champ d’application majeur est la gestion des stocks. L’objectif est d’assurer un service maximal avec un stock minimal, ce qui est une équation complexe. L’IA nous aidera à optimiser les réapprovisionnements en prenant notamment en compte des critères comme le délai de livraison, la fréquence de consommation, la saisonnalité, et la nature des pièces, et ce pièce par pièce !
Le groupe est fortement engagé dans une démarche RSE. Pourriez-vous me citer une action emblématique dans ce domaine ?
C’est une démarche permanente pour développer les valeurs éthiques, écologiques et sociales. Nous sommes assistés hebdomadairement par une conseillère extérieure pour une amélioration constante qui nous a permis de décrocher ces deux dernières années la médaille d’argent. L’or est en vue.
En interne, nous veillons à la sécurité, au bien-être au travail et à la formation continue qui s’élève à 6% de la masse salariale. Nous pratiquons le tri sélectif avec un partenaire, la réutilisation des emballages, l’économie d’énergie, d’éclairage, de chauffage climatisation. Nous venons d’installer 160 kw de panneaux photovoltaïques sur le parking ainsi que l’achat de véhicules de fonction et de service électriques.
En externe, nous participons à la plantation d’1 million d’arbres aux côtés de Bordeaux Métropole, nous sommes membre fondateur des Mécènes du Patrimoine de la Gironde pour préserver le patrimoine culturel. Nous mettons en oeuvre la transition énergétique avec notre partenaire Retrofleet en réemployant par la conversion des véhicules thermiques anciens en les transformant en véhicules électriques.
Comment envisagez-vous les prochaines décennies pour Bacqueyrisses ?
Grâce à Pierre-Marie Gaillon et à son équipe nous avons deux axes de développement : l’expansion géographique et la diversification de nos activités, toujours en lien avec notre coeur de métier l’autocar-autobus. Ainsi, en 2023, nous nous sommes associés à 50-50 avec Negobus de la famille Barbier, un important négociant de minibus, pour créer Laminak, une entreprise dédiée au service après-vente des minibus. Nous sommes toujours à l’affût de nouvelles opportunités.
Propos recueillis par Florence Guernalec