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Décarbonation : Bruxelles vise 2040 pour les camions & les cars, 2030 pour les bus 

02 03 2023 | Actualités

2030 pour les bus urbains, 2040 pour les cars et les camions, avec le recours exclusif à l’électrique ou à l’hydrogène. La feuille de route de décarbonation présentée le 14 février par la Commission européenne ne satisfera donc ni les tenants d’une ligne ultra-volontariste, ni les partisans d’une approche plus pragmatique. Les véhicules lourds génèrent 6% du total des émissions de gaz à effet de serre (GES) et plus de 25% du total du secteur des transports, rappelle la Commission. Dans le cadre du Green Deal européen, Bruxelles propose donc une trajectoire en trois étapes pour réduire les émissions des véhicules lourds mis sur le marché: réduction de 45% des émissions à partir de 2030, de 65% à partir de 2035, et de 90% à partir de 2040 (par rapport aux niveaux de 2019). Et en guise de signal fort, la feuille de route fixe l’objectif du zéro émission à partir de 2030 pour les bus urbains neufs. Les précédentes règles imposaient aux constructeurs de réduire les émissions de CO2 des nouveaux poids lourds de 15% à partir de 2025 et de 30% à partir de 2030, par rapport aux niveaux de 2019. Pour la commission, les technologies privilégiées sont l’électrique à batterie, l’électrique à pile à combustible et l’hydrogène carburant. Dans sa proposition, Bruxelles écarte donc les biocarburants et le bioGNV, mais conserve une série d’exceptions pour certaines catégories d’usages (camions de pompiers, véhicules miniers…).

 

«En 2050, presque tous les véhicules sur nos routes doivent être zéro émission. Notre loi sur le climat l’exige, nos villes l’exigent et nos fabricants s’y préparent. Avec cette proposition, nous veillons à ce que les nouveaux camions deviennent moins polluants et à ce qu’un plus grand nombre d’autobus à zéro émission circulent dans nos villes. La lutte contre la crise climatique, l’amélioration de la qualité de vie de nos citoyens et le renforcement de la compétitivité industrielle de l’Europe vont de pair», a déclaré Frans Timmermans, vice-président de la Commission et commissaire à l’action pour le Climat, chargé du Green Deal. Du côté des constructeurs de véhicules, la réaction est moins enthousiaste. «Atteindre -45% déjà d’ici 2030 est très ambitieux. Il faudrait que les décideurs politiques prennent des mesures tout aussi ambitieuses pour veiller à ce que les autres acteurs de la chaîne de valeur du transport et de la logistique» soient mobilisés, a déclaré Martin Lundstedt, porte-parole de l’ACEA pour les véhicules commerciaux et président de Volvo. Les industriels estiment que l’objectif zéro émisssion fixé aux bus urbains pour 2030 va accroître la pression sur le marché des véhicules, mais aussi sur celui des infrastructures de charge et d’avitaillement en hydrogène, avec à la clé des problèmes de capacité de production. Et même si le camion n’est concerné que dix ans plus tard, une réduction des émissions de CO2 de 45 % d’ici 2030 signifie que plus de 400.000 camions zéro émission devraient être sur la route et qu’au moins 100.000 nouveaux camions zéro émission devraient être immatriculés chaque année. Cela nécessiterait que plus de 50.000 chargeurs accessibles au public et adaptés aux camions soient opérationnels d’ici sept ans seulement, dont environ 35.000 devraient être des chargeurs haute performance (système de charge en mégawatts). Il faudrait en outre quelque 700 stations de remplissage d’hydrogène… Chez les opérateurs de transport publics aussi, la circonspection est de mise. «L’UTP ne peut que rappeler le coût conséquent du renouvellement des flottes de véhicules: un bus électrique coûte près de deux fois plus cher qu’un bus gazole. Compte tenu du contexte inflationniste et de leurs restrictions budgétaires, les AOM devront faire des choix regrettables si elles sont contraintes d’exclure toute autre énergie de leur parc, redoute l’organisation professionnelle. Elles devront en effet baisser l’offre de transport public, augmenter le prix des titres de transport (ticket, abonnement…), allonger la durée de vie des véhicules de type diesel, ou encore ralentir les investissements destinés aux aménagements en faveur des transports collectifs (sites propres, priorité aux feux, mise en accessibilité des arrêts, etc.).»

La liste des contraintes relevées par l’UTP ne s’arrête pas là: «Outre ces problématiques financières immédiates, les bus électriques soulèvent d’autres problématiques importantes: compte tenu de l’autonomie limitée et du temps de charge des bus électriques, il faut parfois en acheter davantage pour assurer la totalité du service alors que certains sont immobilisés par la charge. Par ailleurs, au-delà de 10 bus, la réglementation concernant les dépôts est très contraignante, les adaptations sont onéreuses, et l’éloignement nécessaire des dépôts par rapport aux centres des villes entame l’autonomie des bus.»

La feuille de route proposée par la Commission devra dans les prochains mois être discutée par le Conseil, le Parlement et la Commission avant d’être adoptée. Gageons que les débats seront nourris… 

S. G.

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