Au nom de la loi, mettez de l’ordre dans les gares routières. Forte du succès des lignes Flixbus et Blablacar qu’elle a contribué à mettre en musique ces dix dernières années, l’Autorité de régulation des transports (ART) pousse aujourd’hui l’Etat à organiser la gouvernance des gares routières, un domaine laissé en jachère selon elle.
« Nous travaillons à des propositions susceptibles d’être intégrées à un prochain texte législatif » a dévoilé le président du régulateur Thierry Guimbaud lors d’une conférence de presse donnée le 10 septembre à l’occasion du quinzième anniversaire de l’organisme. Le régulateur qui a instauré un comité de concertation avec les parties prenantes (GART, FNTV, collectivités locales comme Marseille etc.) lui soumettra au préalable ses propositions courant 2026 afin de dégager un consensus.
Le cas de la fameuse gare routière de Bercy dans Paris (6 millions de voyageurs) est symptomatique. « Ile-de-France Mobilités faisait valoir que le transport non conventionné n’est pas de sa compétence, la Ville de Paris que l’autocar n’est pas son truc et voulait donc fermer cette gare immédiatement. Le fait que l’on se soit tourné vers nous comme tiers de confiance pour proposer des solutions montre bien qu’il y a un trou dans la raquette » continue-t-il. Rappelons que Bercy fermera progressivement d’ici 2030 avec transfert d’une partie de son trafic à Pershing dès cet automne.
A Lille où la gare se résume à un simple arrêt, ce sont la communauté urbaine et la région qui se renvoient la balle. Difficile de planifier le développement des gares sans chef d’orchestre clairement identifié.
Au sein du mille-feuille administratif, il s’agira donc de trouver la collectivité adéquate. Il en va de la qualité de service, loin d’être homogène comme l’ont montré les études de l’ART. Les autocaristes doivent s’attendre en contrepartie à une hausse des redevances, « le touché aujourd’hui de 6 euros par autocar pourrait passer à une vingtaine d’euros » conjecture-t-on chez le régulateur.
A écouter Sophie Auconie, membre du collège chargée des autocars, c’est la lune de miel entre l’ART et les transporteurs. « Ils ont su développer une offre efficace, innovante en sachant s’adapter, souligne-t-elle, et ils reconnaissant que l’action de l’ART a été déterminante, notamment pour l’accès aux gares. Nous avons contrôlé les tarifs et l’accès à une centaine de gares, cela n’a pas toujours était facile, il a fallu parfois en passer par des contentieux » résume-t-elle. Et de citer celui entre Flixbus et Transdev concernant l’accès au parking du Mont-Saint-Michel, géré par le second.
Au total, les autocars librement organisés – surnommés autocars Macron quand celui-ci avait la cote – transportent 10 millions de personnes par an dont 2 millions n’auraient pas voyagé. Le régulateur chiffre à 10 euros par personne l’argent économisé par trajet, soit 100 millions au total et souligne le caractère « écologique » de ce transport étant donné le taux de remplissage important des véhicules. Reste tout de même le problème des nuisances subies par les riverains des gares routières dont le juge arbitre a bien conscience tout en étant incompétent en la matière.
Marc Fressoz