« La durée des contrats doit être rallongée pour prendre en compte le coût d’acquisition des véhicules électriques »
Hangard Autocars dispose d’un parc d’autocars 100% thermique. Néanmoins, sa directrice générale, Sylvie Mazars, anticipe l’arrivée de véhicules électriques dans son nouveau dépôt. Parallèlement, le groupe vise, pour la fin de l’année 2025, le label Réunir RSE, un atout pour les prochains appels d’offres.
Mobily-Cités : Quelle est l’activité Hangard Autocars ?
Sylvie Mazars : 60% est lié au transport scolaire et régulier, et 40% à l’occasionnel et au tourisme. Notre chiffre d’affaires est stratégiquement diversifié. Notre groupe possède également un garage pour l’entretien de nos autocars (et de poids lourds externes) ainsi que des agences de voyage qui conçoivent et vendent, notamment, des séjours ou des excursions d’une journée réalisés avec notre flotte d’autocars de tourisme. Nos prestations couvrent toute la France, et principalement les pays limitrophes. Hangard Autocars est une entreprise familiale créée voici 100 ans en Seine-Maritime. Nous employons 185 collaborateurs, dont 85% de conducteurs, et gérons un parc de 180véhicules, dont 10 véhicules de 9 places pour effectuer des navettes aéroport, exclusivement thermique – diesel et HVO. Actuellement, l’âge moyen de nos véhicules estautour de 5,5 ans, ce qui représente un engagement fort en matière de sécurité et d’écologie.
Comptez-vous répondre aux marchés qui exigeront des « autocars propres » ?
Oui, bien sûr, nous nous positionnerons sur les appels d’offres exigeant de l’électrique, mais pas à n’importe quel prix. Nous devrons certainement négocier des options avec les constructeurs et un échéancier de déploiement. En outre, nous anticipons cette transition en adaptant nos infrastructures. Ainsi, notre nouveau dépôt de bus, le bâtiment en cours de reconstruction doit accueillir des panneaux photovoltaïques afin d’être en autoconsommation et autosuffisant en électricité, mais aussi en prévision d’alimenter des bornes de recharge électrique… même si nous n’avons pas prévu, pour l’instant, de les installer.
Avez-vous arrêté votre stratégie en matière de transition énergétique ?
Nous n’avons pas encore complètement arrêté nos choix sur le type de motorisation. Le coût d’un véhicule électrique est élevé, mais nous sommes prêts à passer le cap avec le soutien des collectivités : en clair, sans prolongation de la durée des contrats, nous ne pourrons pas amortir ces investissements. J’espère que les AOM ont entendu le message porté par la profession et la FNTV sur ces attentes…
Le principal frein à la transition énergétique sur le transport régulier reste donc financier…
En effet, d’autant que les aides demeurent insuffisantes pour faire face aux montants à investir. En outre, passer à l’électrique pose aussi des problèmes pratiques. Aujourd’hui, une partie de nos conducteurs scolaires stationnent les véhicules à proximité de leur domicile. Si nous passons à l’électrique, nous devrons prévoir un retour systématique au dépôt, ce qui générerait des déplacements supplémentaires plus coûteux et peu commodes…
Dans ce contexte financier, envisagez-vous de procéder au rétrofit de vos véhicules thermiques afin de réduire le montant des investissements ?
Notre politique de renouvellement s’est toujours portée sur des véhicules neufs, nous souhaiterions donc poursuivre cette dynamique avec l’électrique. Cependant, pour un besoin ponctuel, suite à la casse d’un moteur thermique par exemple, nous pourrions étudier l’option rétrofit.
Quelles sont les autres contraintes dans votre activité de transport occasionnel ?
Le stationnement des autocars dans certaines grandes agglomérations, en particulier à Paris, est un problème récurrent. Les conducteurs doivent déposer rapidement les clients sur le lieu de visite et aller se stationner plus loin sous peine d’une contravention. Bien que cela n’ait pas, à ce stade d’impact direct sur notre chiffre d’affaires parisien, cette situation génère une contrainte opérationnelle et logistique importante.
Avez-vous noté une modification du marché de l’occasion des autocars diesel ?
Non pas pour le moment. Compte tenu de l’état de nos véhicules, souvent peu kilométrés et bien entretenus, nous n’avons aucun mal à revendre nos occasions que ce soit en France ou à l’étranger. La pénurie d’autocars contribue également à faciliter la revente des véhicules thermiques.
Rencontrez-vous toujours des difficultés de recrutement des conducteurs ?
La difficulté est moindre, mais la vigilance reste de mise. Nous organisons régulièrement des formations de titre professionnel, à raison d’environ cinq sessions par an, chacune accueillant entre 10 et 12 futurs conducteurs. Cette initiative nous permet d’anticiper les besoins liés à la croissance de notre activité, ainsi que de compenser les départs à la retraite comme les départs volontaires de conducteurs qui recherchent un temps plein. Actuellement, ces formations sont principalement financées par France Travail, les Régions et l’OPCO. En échange, nous nous engageons à embaucher les personnes formées. Nous collaborons également avec des agences d’intérim qui nous proposent des conducteurs déjà titulaires de leur titre professionnel.
Enfin, nous avons un formateur interne polyvalent qui assure le suivi des nouveaux arrivants et qui, plus généralement, sensibilise nos conducteurs à l’écoconduite. Les effets positifs de ces dernières formations sont visibles. Nous sommes toutefois inquiets, car le financement des titres professionnels pourrait être revu à la baisse entraînant des coûts supplémentaires pour l’entreprise sans avoir la certitude que les candidats respectent leur engagement de venir travailler chez nous au moins un an.
Hangard Autocars est aussi engagé dans une démarche pour obtenir le label Réunir RSE…
C’est un sujet qui nous tient particulièrement à coeur. Cette certification représente un gage de sérieux et d’engagement envers des pratiques durables et responsables, et qui est de plus en plus requis dans les appels d’offres. Réunir et notre partenaire Semafor nous accompagnent dans cette démarche. Cela nous permet de formaliser et de valoriser des pratiques déjà existantes et de nous conformer aux normes et aux bonnes pratiques en matière de responsabilité sociétale, critères souvent valorisés dans le cadre des candidatures aux marchés publics et privés
Quels sont vos projets ?
Nous avons l’ambition de développer notre chiffre d’affaires et sommes ouverts à de la croissance externe.
Propos recueillis par Florence Guernalec