En octobre 2023, la FUB et la Fnaut ont publié le livre blanc «Vélo et transports collectifs: des alliés pour la transition». Le 30 janvier 2024, le think tank TDIE a organisé un débat, pour rebondir sur les propositions des deux associations d’usagers. L’objectif ? S’interroger sur «la complémentarité réelle» entre les deux modes de transport, mais aussi sur «les fragilités de cet écosystème», selon son coprésident, Louis Nègre.
L’amélioration de la gouvernance, et notamment l’association des usagers en amont des concertations, font partie des propositions qui ont fait consensus. Pour Morgane Castanier, directrice clients, marketing et technologies de SNCF Gares & Connexions, «mettre les usagers au centre des projets permet de viser juste lorsqu’on fait des propositions de services et évite le gaspillage…» De son côté, Claire Heidsiek, pilote du groupe de travail Vélo à Régions de France, a assuré que les usagers allaient être davantage consultés: «Si jusqu’à présent peu de comités de partenaires se sont tenus, c’est parce que nous considérons qu’il faut prendre le temps de bien le faire…»
Dans leur livre blanc, la FUB et la Fnaut plaident aussi en faveur de bassins de vie maillés par des réseaux cyclables et de transports collectifs pour faire système. Pour y parvenir, les deux associations d’usagers recommandent d’intégrer systématiquement le vélo aux pôles d’échanges et aux arrêts de transport. «Cela implique de repenser les plans de circulation autour des gares avant même le stationnement», prévient Olivier Schneider, président de la FUB. «Les voyageurs ne prendront pas une départementale à 90 km/h pour venir à la gare à vélo», a confirmé Claire Heidsiek qui est aussi directrice des territoires, de l’innovation et des nouvelles mobilités de la région Grand Est. Or Camille Thomé, délégué générale de Vélo & Territoires, est convaincue que ce sont dans ces zones périurbaines et rurales que réside pourtant le plus grand potentiel d’usagers pour faire des rabattements à vélo sur les gares avec notamment la perspective des services express régionaux métropolitains (SERM).
Concernant l’accès à des places de stationnement vélo sécurisées, la LOM votée en 2019 a déjà acté la réalisation des infras à proximité des gares. Depuis, 23.000 places ont été déployées soit 35% de l’objectif, selon Morgane Castanier: «L’avancement des projets est inégal selon les Régions. Cela tient à la maturité du système vélo, la volonté des Métropoles, la synchronisation avec les projets urbains des villes, mais aussi à des contraintes techniques et sur le foncier».
Autre frein identifié, l’embarquement des vélos à bord des TER. «C’est un vrai sujet, a reconnu Camille Thomé. Comment continuer à accueillir des vélos sans réservation et sans régulation ? Faut-il en interdire l’accès à certaines heures pour ne pas créer de conflits avec les autres usagers des TER ?» La FUB et la Fnaut recommandent d’aménager des espaces pérennes destinés aux vélos non démontés, mais aussi de prévoir des espaces multifonctionnel et modulaires pour s’adapter à la demande.
Un déficit de compétences
Les deux associations d’usagers plaident également pour une amélioration de la promotion des déplacements qui combinent vélo et transports collectifs : signaler et afficher systématiquement les réseaux cyclables et de transports collectifs sur les plans, dans l’espace public par du jalonnement et dans les calculateurs d’itinéraires. Gares & Connexions travaille sur l’information multimodale à l’image des équipements déployés sur le parvis de la gare de Toulouse Matabiau: «Ce n’est pas facile de collecter cette donnée, car cela nécessite de nous adresser à plusieurs acteurs», a expliqué Morgane Castanier.
Surtout, la FUB et la Fnaut recommandent de rendre la billettique interopérable à l’échelle des bassins de mobilité, en priorité entre les transports collectifs et l’accès aux stationnements sécurisés et aux services de location de vélo. «Aujourd’hui, il faut être un expert des deux modes et très motivé pour combiner les deux !», a regretté Olivier Schneider.
Claire Heidsiek a également souligné la nécessité de faire monter en compétences les petites communes, et notamment de leur fournir des moyens techniques et financiers. Un point de vue partagé par Camille Thomé qui regrette que les financements publics soient fléchés vers l’investissement: l’ouvrir à des dépenses de fonctionnement permettrait notamment de combler le déficit de compétence en ingénierie. En revanche, Claire Heidsiek considère que l’Etat est globalement au rendez-vous: «Les textes législatifs existent et les financements via le plan vélo et les CPER ne manquent pas. Faisons déjà les projets qui sont là…»
Florence Guernalec