« Les AO ne doivent pas choisir entre décarbonation et niveau de l’offre »
20 ans après avoir accueilli sa 1re ligne de tramway, Clermont- Ferrand vit au rythme des travaux de réalisation de 27 km de BHNS. Fin 2025, la mise en service de ces deux lignes de BHNS va permettre d’augmenter l’offre de transport urbain et de compléter le maillage du territoire. Pour François Rage, maire de Cournon d’Auvergne et président du SMTC, Inspire porte les ambitions de la capitale auvergnate en matière de déplacements et de cohérence territoriale.
Propos recueillis par Sandrine Garnier
Mobily-Cités : Le modèle économique des transports publics reste au coeur des préoccupations. Comment mieux faire entendre la voix du secteur ?
Marc Delayer : Remboursement des avances liées à la crise sanitaire, soutien face à la hausse des prix de l’énergie, accompagnement à la conversion des flottes de véhicules, financement de l’amélioration de l’offre, mise en place des zones à faibles émissions… les sujets de mobilisation ne manquent pas, aussi bien pour les autorités organisatrices que pour les entreprises et les opérateurs de transport. Les Rencontres nationales du Transport public vont être l’occasion de mobiliser les associations d’élus et de présenter une position commune sur les questions liées au financement des transports publics. La transition énergétique et la nécessité de créer un choc d’offre sont deux sujets liés à la nécessité de renforcer la lutte contre le réchauffement climatique. Les difficultés de pouvoir d’achat et la mise en oeuvre des ZFE viennent renforcer l’acuité de ces questions. Les autorités organisatrices ne doivent pas en arriver à devoir choisir entre décarbonation et niveau de l’offre. Pour constituer un ensemble efficace, il faut que chaque domaine soit performant. Et sans un réel soutien de l’Etat, les collectivités ne seront pas en capacité de répondre aux besoins, d’autant plus que les urgences sont partout, pas seulement dans le domaine de la mobilité.
Du fait de son caractère collectif, le transport public n’est-il pas plus propre ? Pourquoi le secteur devrait-il faire plus d’efforts ?
Le transport public se doit d’être exemplaire. Mais la focalisation sur l’électromobilité n’a pas facilité les choses. Devant le niveau élevé des investissements et l’absence de maturité technologique des solutions, certains ont d’ailleurs préféré reporter leurs décisions, avec des effets contre-productifs. A la limite, on aurait été plus efficaces en conservant des véhicules diesel de dernière génération… Plutôt que le tout-électrique, l’approche défendue par le secteur est celle d’un mix équilibré, avec de l’électrique à batterie ou à pile à combustible, du bioGNV, du biocarburant… En matière de transition énergétique, la meilleure démarche consiste probablement à privilégier un écosystème local. Surtout, il faut faire confiance aux territoires, où les collectivités travaillent avec les opérateurs en bonne intelligence.
Depuis la sortie de la crise sanitaire, la gratuité a le vent en poupe. Comment concilier ce type d’aspiration avec une gestion plus rigoureuse des deniers publics ?
Les sensibilités sur ce sujet sont diverses, mais il faut bien constater qu’aucun gros réseau n’est passé à la gratuité. Le débat peut faire sens quand les recettes commerciales restent faibles, et qu’il coûte aussi cher de conserver la billetterie et d’organiser les contrôles que de renoncer à la vente des titres de transport. Mais je ne suis pas convaincu par l’argument de l’attractivité : rien ne démontre l’élasticité de la demande par rapport au prix. Les usagers attendent d’abord une offre de qualité.