Les cars scolaires ne sont pas épargnés par le harcèlement et les incivilités. Un élève sur 5 serait victime d’intimidation ou de violence dans les transports scolaires, et seulement 20% des agresseurs sont extérieurs à l’univers scolaire de leur victime. Ces chiffres émanant d’une enquête menée par la Région Auvergne Rhône-Alpes et rendue publique en 2019, reflètent l’étendue du problème. Même si les statistiques spécifiques manquent encore, la sensibilité au sujet est telle que les différents acteurs doivent se mobiliser aussi bien sur la prévention que sur l’identification et le traitement des incidents. «Pour être efficace, l’approche partenariale est essentielle», souligne le lieutenant-colonel Marjorie Gorlin, chef de bureau adjoint à la sécurité des mobilités, à la Direction générale de la Gendarmerie nationale, lors du congrès organisé le 25 janvier par l’Association nationale pour les transports éducatifs de l’enseignement public (Anateep). Les actions entreprises doivent associer transporteurs, forces de l’ordre, ainsi que des représentants de la communauté éducative, des parents d’élèves mais aussi des jeunes. Les deux principaux opérateurs de transport français, Keolis et Transdev, ont d’ailleurs signé un partenariat national avec la Gendarmerie depuis 2020, afin notamment d’organiser des sessions de sensibilisation à destination de leurs salariés.
C’est le cas au sein de l’entreprise Transdev Marne et Ourcq, présente en Seine-et-Marne. «A l’occasion des émeutes de juin 2023, nous nous sommes rendu compte des points à améliorer, et nous avons engagé un travail avec la police nationale, la police municipale, les contrôleurs et les conducteurs», relate Noémie Loureiro, directrice du réseau. Des séances de formation organisées deux fois par mois permettent notamment aux conducteurs de mieux appréhender les situations à risque, et de savoir comment réagir. A peine 1 victime sur 10 signale ses problèmes, indique pour sa part Catherine Turmel, responsable de l’expérience client chez RATP Dev. La vigilance des adultes est donc fondamentale pour repérer les situations anormales. Grâce à des exercices de simulation, différents cas sont passés en revue, et les conducteurs savent quand ils doivent ouvrir ou fermer les portes pendant une intervention des forces de l’ordre; les contrôleurs apprennent à bien se placer pour neutraliser les fraudeurs. «Chacun comprend mieux le travail des autres et leurs contraintes. C’est aussi très important pour nos agents d’entendre le droit de la bouche des policiers ou des gendarmes. Nous avons largement renouvelé nos effectifs de conducteurs, et ils ont besoin de ces compléments de formation», poursuit Noémie Loureiro. La jeune femme insiste aussi sur l’importance de la vidéoprotection, qui joue un rôle dissuasif incontestable. Une constatation partagée par Christophe Trebosc, secrétaire général de l’Anateep, qui rapporte par exemple le retour d’expérience du Territoire de Belfort.
Du côté de l’Education nationale, un programme de lutte contre le harcèlement à l’école, nommé Phare, vient d’être lancé, accompagné de la mise en place d’un numéro vert, le 3018. Des éléments de communication repris par exemple en Région Grand Est, qui va faire figurer ce numéro sur les cartes de transport des élèves, et déployer une campagne d’affichage dans les autocars à partir du mois d’avril. Pour l’Anateep, il s’agit aussi de développer un discours ciblé en direction des élèves, entre sensibilisation et responsabilisation. S’ils représentent un maillon essentiel dans la lutte contre le harcèlement, les jeunes ne doivent pas être encouragés à «dénoncer» leurs camarades.
Sandrine Garnier