Le transport public cherche à faire autant sans obtenir plus
Aucun cadeau, mais des efforts à fournir et de nouvelles pistes à défricher. « On ne peut pas tout demander à l’État. Il faut trouver des solutions qui ne coûtent pas trop cher et qui sont décarbonées. » La venue du ministre délégué aux Transports, François Durovray, le dernier jour du salon EUMO à Strasbourg a, comme prévu, douché les espoirs qu’entretenait le GART vis-à-vis de l’un de ses membres devenu membre du gouvernement. Pas d’argent frais à espérer donc, dans la lignée du discours de politique générale prononcé le 2 octobre par le Premier ministre Michel Barnier, qui demande à tous ses ministres de « faire beaucoup avec peu ».
Pourtant, comme à son habitude, l’association d’élus avait listé ses revendications phares : une TVA à 5,5 % et une hausse de la contribution des entreprises à travers le versement mobilité. « Je suis fatigué d’entendre qu’il n’y a plus d’argent en France alors que nous sommes le pays qui paie le plus d’impôts ! J’attends qu’on me dise où est passé l’argent », a surjoué . Louis Nègre, le président du GART, en ouvrant le salon le 2 octobre.
De son côté, bien qu’associée au GART dans l’organisation du Salon, l’UTPF n’en mûrit pas moins ses propres réflexions, en évitant, organisation patronale oblige, de céder à la revendication pavlovienne de la hausse des prélèvements. Le MEDEF et l’UTPF (adhérente de la première) ont diffusé une « position commune » dans cet esprit le même jour.
Ils « demandent conjointement aux pouvoirs publics d’affecter aux transports publics une fraction du produit de la mise aux enchères des quotas d’émission de gaz à effet de serre (ETS 1) afin d’aider les AOM à développer l’offre de transport public sur leurs réseaux ». La portion revendiquée représente 250 millions d’euros sur les quelque 2 milliards d’euros acquittés par les pollueurs-payeurs en France. Mais pas un sou « n’a jamais été fléché vers les transports publics », regrette Marie-Ange Debon, la présidente de l’Union des transports publics et ferroviaires. Il était temps que les professionnels du secteur se rendent compte de l’existence d’un tel gisement potentiel. Les revendications pourraient être satisfaites grâce à la révision de la législation européenne qui impose que les fonds de ces droits à polluer soient reversés à un nombre limité de secteurs verts.
Pour tenter de surmonter son « mur d’investissement » mais aussi son « mur de fonctionnement » (cette notion est apparue récemment), le secteur lorgne également l’argent disponible au niveau européen. Durant le salon, un représentant de la DG Move à Bruxelles a voulu apporter son soutien en listant une série de gisements potentiels, certes bien dotés, mais longs et compliqués à obtenir : le Feder, les ETS 2, l’Eurovignette revue et corrigée, le mécanisme d’interconnexion, etc.
Pas sûr que cela permette de résoudre la vertigineuse équation exposée en 2022 par les sénateurs Hervé Maurey et Stéphane Sautarel. En Île-de-France, il faut trouver 30 milliards d’euros à l’horizon 2030 pour financer les investissements prévus et 20 milliards de plus pour faire fonctionner les transports en commun, augmentés du Grand Paris Express. En province, c’est à peu près la même chose : 30 milliards d’investissements pour l’urbain et le TER et 25 milliards d’euros pour l’exploitation.
Alors que les premiers éléments budgétaires laissent entrevoir une baisse des moyens pour les réseaux, François Durovray distille des messages avec des sous-entendus « Face à la double dette budgétaire et écologique, nous devons inventer un nouveau modèle pour nos transports », a-t-il déclaré sur France 3 Alsace, en vantant les cars express comme une « réelle alternative à la voiture », se défendant d’en faire aussi une alternative au train. La mise en place du coûteux volet ferroviaire des SERM, qui comptent aussi un volet car express, risque-t-elle d’être retardée ?
Marc Fressoz