Quatre ans après l’arrivée de Trenitalia sur la grande vitesse française, le paysage ferroviaire a déjà profondément changé. Selon de nouvelles données publiées par Trainline, appuyées par une enquête Ipsos menée auprès de 3 000 voyageurs européens, une tendance s’impose nettement : dès que la concurrence arrive, les prix baissent et les trains se remplissent.
La France en offre l’illustration la plus spectaculaire. Depuis que les Frecciarossa circulent entre Paris et Marseille, le tarif moyen a chuté de 29 %. Surtout, les réservations ont été multipliées par trois, un signe clair que l’ouverture du marché a stimulé la demande. À l’inverse, sur les axes encore en monopole, la mécanique tarifaire suit une tout autre pente : entre l’été 2024 et l’été 2025, les prix sur Paris–Bordeaux ont progressé de 9 %, rappelant qu’en l’absence de pression concurrentielle, les hausses s’installent rapidement.
L’Espagne confirme ce diagnostic. L’arrivée de plusieurs opérateurs sur la grande vitesse depuis 2021 a durablement transformé la liaison Madrid–Barcelone, devenue 58 % moins chère qu’avant l’ouverture. Mais le retrait d’AVLO en septembre 2025 a brutalement inversé la courbe : en un an, les prix ont bondi de 40 %. Preuve que la concurrence n’est pas seulement un accélérateur de baisse, mais un stabilisateur indispensable.
L’Italie, pionnière européenne de la libéralisation, montre à quoi peut ressembler un marché arrivé à maturité. Douze ans après l’ouverture, les tarifs de la grande vitesse restent 40 % en dessous du niveau d’avant 2012, et la fréquentation continue de progresser : +9 % en 2024 sur des axes majeurs comme Florence–Rome ou Milan–Turin. Un horizon qui éclaire les perspectives françaises et espagnoles : tarifs plus accessibles, choix élargi, report modal renforcé.
Au-delà des chiffres, l’étude Ipsos révèle un triptyque déterminant pour les voyageurs : prix, ponctualité, confort. En France, 87 % placent le prix en premier critère, tandis que 97 % réservent désormais leurs billets en ligne. Le besoin de simplicité progresse également : 70 % des voyageurs français souhaitent un billet unique pour les trajets impliquant plusieurs opérateurs, signe que l’ouverture doit s’accompagner d’outils numériques intégrés.
L’intelligence artificielle entre désormais dans l’équation : 72 % des Français déclarent lui faire confiance pour améliorer leur expérience, notamment via des recommandations plus précises et une meilleure personnalisation.
Pour Alexander Ernert, Managing Director France chez Trainline, le message est limpide : « La concurrence bénéficie clairement aux passagers, en faisant baisser les tarifs et en attirant davantage de voyageurs vers le rail. Combinée à l’innovation numérique, l’Europe a l’opportunité de simplifier les déplacements et de faire du train le choix naturel face à l’avion ou à la voiture ».
Pierre Lancien



