Interview avec Yannick Monnier, directeur de la Régie des transports du Territoire de Belfort, suite à l’incendie des bus hydrogène
Cet incident ne remettra pas en cause la stratégie Hydrogène du Territoire de Belfort.
Mobily-Cités : L’incendie des bus hydrogène à Belfort a marqué les esprits. Comment cet événement s’est-il déroulé ?
Yannick Monnier : Cet incendie est effectivement un événement marquant. Il s’est déclenché dans la nuit du 1er au 2 janvier, précisément à 2h17, sur un bus stationné au dépôt. Ce qui est surprenant, c’est que ce véhicule n’avait pas circulé depuis le 31 décembre et n’était donc pas thermiquement chaud. Le feu a débuté sur un seul bus, avant de se propager aux autres véhicules stationnés à proximité. Heureusement, personne n’était présent sur le site au moment des faits, et il n’y a aucun blessé à déplorer.
Avez-vous déjà des conclusions sur l’origine de cet incendie ?
Il est encore trop tôt pour tirer des conclusions définitives. Ce que nous savons, c’est que l’incendie n’est pas lié à l’hydrogène ni à son utilisation. Les premières analyses indiquent qu’il s’agit d’un feu d’origine électrique, mais il reste à déterminer quel équipement a chauffé ou s’est détérioré pour déclencher cet incident. Nous attendons avec impatience les résultats des experts pour mieux comprendre.
Quels ont été les mécanismes de sécurité en place au moment de l’incendie ?
Tous les systèmes de sécurité des bus hydrogène ont parfaitement fonctionné. Les fusibles TPRD des réservoirs ont efficacement évacué l’hydrogène, générant des sifflements qui ont alerté les riverains et mobilisé les pompiers. Les torchères ayant alimenté l’incendie provenaient des matières plastiques et autres matériaux en combustion, sans lien avec les flammes d’hydrogène, rapidement dissipées grâce aux dispositifs de sécurité
Cet incident remet-il en question l’avenir de l’hydrogène dans votre flotte ?
Absolument pas. Nous restons convaincus que l’hydrogène a toute sa place dans les mobilités du futur. Belfort a fait le choix stratégique d’investir dans cette technologie, avec l’objectif que 50 % de notre parc soit composé de bus hydrogène. Ces véhicules offrent une autonomie exceptionnelle, pouvant aller jusqu’à 400 kilomètres, ce qui est essentiel pour couvrir les longues tournées de notre réseau. L’incendie ne remet pas en cause la pertinence de l’hydrogène, d’autant plus que l’origine électrique de l’incident aurait pu survenir sur n’importe quel autre type de bus, y compris électrique.
Comment voyez-vous l’évolution de votre flotte à l’avenir ?
Nous croyons fermement à un mix énergétique. Si 50 % de notre parc sera composé de bus hydrogène, il est probable que les 50 % restants incluront des bus électriques. Nous avons également prévu de recevoir huit bus Solaris articulés en octobre 2025, et nous réfléchissons à des solutions pour améliorer le stationnement et limiter les risques. Cependant, doubler la surface de notre dépôt pour espacer les véhicules n’est pas envisageable, compte tenu des contraintes foncières.
Quelle est la place de la production locale d’hydrogène dans votre stratégie ?
Nous avons la chance de disposer d’une station de production et de distribution d’hydrogène vert, située à proximité de notre réseau. Exploitée par une filiale d’EDF, cette station fabrique de l’hydrogène par électrolyse, et nous en sommes aujourd’hui le principal client. À l’avenir, cette infrastructure bénéficiera également à l’industrie et aux véhicules individuels. Cela confirme que l’hydrogène est une solution d’avenir pour répondre aux défis énergétiques et environnementaux.
Cet incident est un rappel des défis techniques que pose toute nouvelle technologie, mais il ne doit pas freiner le développement de l’hydrogène dans les transports. Nous restons engagés à construire une mobilité durable, en combinant sécurité, innovation et mix énergétique, pour répondre aux besoins de nos usagers et aux impératifs de la transition écologique.
Propos recueillis par Pierre Lancien