La salle était pleine. L’ambiance, solennelle mais teintée de détermination, illustrait la complexité du moment. Devant une assemblée attentive, Alexis Gibergues, Président de l’OTRE, a pris la parole pour clore une journée marquée par l’urgence des défis auxquels fait face le secteur du transport routier. « Ces deux dernières années ont été éprouvantes », a-t-il commencé, évoquant une inflation galopante, un alourdissement des charges et un manque de visibilité pesant lourdement sur les entreprises. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : une baisse généralisée du chiffre d’affaires, des coûts d’assurances qui s’envolent et une fiscalité du carburant toujours plus lourde.
Face à ces obstacles, le message de l’OTRE est sans équivoque : les entreprises du secteur n’acceptent plus d’être prises en étau. La suppression brutale de la Déduction Forfaitaire Spécifique et les contraintes sur le verdissement des flottes ne font qu’alimenter la méfiance vis-à-vis des décisions gouvernementales. Mais loin de se limiter à un catalogue de doléances, l’OTRE propose des solutions : « Nous avons formulé 22 propositions urgentes pour le transport de marchandises et 18 mesures pour les voyageurs », a rappelé Alexis Gibergues. Des solutions « à coût zéro pour les finances publiques », insiste-t-il.
Pour le Président de l’OTRE, la compétitivité des TPE et PME passe par une juste répartition de la valeur. La revalorisation des opérations de transport, le respect des délais de paiement, et la lutte contre les prix abusivement bas constituent les batailles de l’heure. Derrière ces revendications, se dessine une volonté de justice sociale : garantir des revenus décents et une reconnaissance légitime à ceux qui font tourner les roues de l’économie.
L’avenir du secteur, l’OTRE le conçoit également comme une transition énergétique réaliste et soutenable. Si la décarbonation des flottes est un impératif, Alexis Gibergues insiste : « Les entreprises ont besoin de visibilité sur le long terme, d’accompagnements financiers et de solutions pragmatiques telles que le rétrofit ». Une vision qui se heurte encore à la rareté des infrastructures de recharge et aux incertitudes budgétaires.
Ce discours, empreint de lucidité, a aussi laissé place à une ambition plus large : celle de réformer les pratiques du transport de marchandises. La lutte contre le cabotage illégal, la transparence des prix sur les bourses de fret, ou encore la régulation des temps d’attente et des échanges de palettes constituent autant de pistes pour redresser un secteur fragilisé. « La route sera toujours un vecteur essentiel de notre économie », martèle Alexis Gibergues, mais il faut en garantir la pérennité.
Dans un contexte où l’instabilité économique côtoie une transition environnementale exigeante, l’OTRE entend jouer un rôle central dans la construction d’un avenir durable pour le transport routier. La feuille de route est claire : mobilisation auprès du gouvernement, des administrations et des élus pour porter haut les intérêts du pavillon français. Pour Alexis Gibergues, c’est un défi collectif, mais aussi une responsabilité historique : « La mutation de notre filière est en marche. Nous sommes prêts à relever le défi, mais nous comptons sur les pouvoirs publics pour nous accompagner. »
Ce soir-là, en clôturant son intervention, Alexis Gibergues n’a pas caché son inquiétude face aux « signes avant-coureurs d’une nouvelle crise agricole » qui pourrait perturber une période cruciale pour les transporteurs. Mais il a aussi réitéré son refus catégorique de solutions telles que l’Ecotaxe Régionale, perçue comme une menace directe pour la compétitivité.
Au-delà de la crise, une conviction : le transport routier, sous toutes ses composantes, reste vital pour la France. Ce n’est pas une demande d’aides, mais un appel à vivre dignement de leur labeur, que les professionnels ont exprimé. Un appel que l’OTRE continuera de porter avec force.
Pierre Lancien