Emmanuel-Denis
Emmanuel Denis
Président de Tours Métropole

« Avec la gratuité, le bus est devenu un bien commun »

 

Les projets ne manquent pas dans la métropole de Tours. À commencer par la deuxième ligne de tramway prévue pour 2028, un réseau cyclable qui se met en place, la conversion de la flotte de bus au gaz et une réflexion plus large sur l’étoile ferroviaire. Emmanuel Denis, vice-président aux transports de Tours Métropole Val de Loire et président du syndicat des mobilités de Touraine (SMT), parle de « révolution des mobilités ». 50 millions de passagers sont attendus dans les 5 ans sur le réseau Fil Bleu.

Gratuit depuis plus de 20 ans, le réseau Horizon continue d’évoluer pour répondre aux besoins des habitants. La métropole soutient aussi le vélo et la mobilité autonome, en partenariat avec Keolis. Le vice-président en charge des Mobilités, qui est aussi président du département de l’Indre, détaille sa politique.

Propos recueillis par Charline Poullain

 

Mobily-Cités : Quelles sont les grandes réflexions et orientations en matière de mobilité sur l’agglomération de Tours ?

Emmanuel Denis : Nous avons lancé une révolution des mobilités pour inciter nos concitoyens à sortir de l’autosolisme. Aujourd’hui, la part modale de la voiture est de 53%, contre 11% pour celle des transports en commun. Notre réponse se fait à plusieurs niveaux. Les solutions pour améliorer les cheminements piétons sont déléguées à chaque municipalité, Tours a par exemple re-piétonnisé des zones. Il y a également un plan vélo : nous avons adopté en 2021 un schéma directeur vélo avec la création de 13 itinéraires structurants traversant la métropole. Cette année, 5 M€ de travaux sont prévus, 10 M€ l’an prochain et 20 M€ en 2025. Ce qui nous permettra d’avoir trois à quatre itinéraires complets, longs chacun d’une vingtaine de kilomètres. Puis d’autres tranches seront programmées. L’objectif est de permettre de développer des flux de « vélotaffeurs » qui vont de l’extérieur de la métropole vers le centre et inversement.

 

Et sur le volet transport en commun, il y a bien sûr la future deuxième ligne de tramway.

La première allait du Sud-Ouest au Nord-Est, la seconde ira du Sud-Est au Nord-Ouest. La deuxième ligne fera près de 13 km allant de Chambray-lès- Tours à La Riche en traversant Tours. Elle s’accompagnera de deux parkings- relais de 400 places, afin que les gens qui viennent par le périphérique puissent laisser leur voiture et prendre le tram. L’objectif est d’avoir 35 000 passagers par jour au début et nous espérons dépasser largement ce niveau de fréquentation, comme avec la première ligne.

Que vous apprend votre recul de 10 ans sur la ligne A ?

 Mise en service en août 2013, ligne A du tram a rencontré un succès immédiat, ce qui a permis de booster de 40% l’usage des transports en commun. Les premières évaluations prévoyaient 50 000 voyageurs par jour et nous sommes rapidement montés à plus de 60 000, ce qui est toujours le cas en moyenne. Et jusqu’à 68 000 en pointe. Y avez-vous apporté des modifications en 10 ans ? Non car elle était bien dimensionnée, avec 21 rames de 40 m. Nous n’avons pas ajouté de stations ni de rames. Elle effectue un parcours de 15 km en 47 min, avec un passage toutes les 6 min, de 5h30 à 00h30. La ligne 2 du tram sera-t-elle accompagnée d’une ligne de bus à haut niveau de service ? Nous avons aujourd’hui une ligne à haut niveau de service, la ligne Tempo. Elle transporte jusqu’à 25 000 voyageurs par jour et arrive à la limite de sa capacité, ce qui justifie le passage au tramway. Sur sa moitié Sud, elle sera donc remplacée par la deuxième ligne de tramway. Ainsi, les travaux du tram s’accompagnent de ceux de la modification de la ligne Tempo. D’autres lignes de BHNS sont-elles en projet ? Nous continuons nos analyses pour développer le réseau. Nous étudions une ligne 3 du tram, ou d’abord un BHNS… Par exemple entre Saint-Pierre-des-Corps et Saint-Cyr-sur-Loire. Il y a beaucoup de projets, mais la priorité est la ligne 2 avec la modification de la ligne de BHNS. Comment va évoluer la flotte de bus ? L’an dernier, 15 bus au gaz ont été mis en service, autant cet été et 15 autres sont à venir. Les derniers seront des articulés pour le BHNS. À terme nous devons avoir 30% de bioGNV utilisés pour ces bus. La station de rechargement est au dépôt à Saint-Pierredes- Corps.

« Nous étudions une ligne 3 du tram, ou d’abord un BHNS… »

Pouvez-vous revenir sur le travail que vous menez sur l’intermodalité ?

Nous avons un travail de mise en cohérence avec tous les partenaires, dont le réseau routier. Nous pourrions avoir des bus express sur l’autoroute A10, qui traverse la ville. Un travail est engagé pour créer des pôles d’échanges multimodaux (PEM). Aujourd’hui notre exemple majeur est la gare de Tours, où se trouve la gare routière, un arrêt de tramway et une station vélo de 200 places. Demain nous aurons un schéma avec plusieurs PEM de ce type, dont deux en bordure de l’autoroute. Nous sommes en train d’étudier ce maillage.

Que contient le protocole d’intention signé en janvier dernier pour l’étoile ferroviaire ?

Nous avons comme objectif de dynamiser notre étoile ferroviaire constituée de huit branches, ce qui constitue un potentiel de développement intéressant sur l’ensemble du département. Avec l’ensemble des intercommunalités d’Indre-et-Loire, nous avons signé la volonté de s’inscrire dans les projets de SERM, le service express régional métropolitain. Il est question de rénover si nécessaire et de rajouter des trains partout où c’est possible avec un maximum d’arrêts dans les gares périphériques de la métropole pour permettre une complémentarité avec notre réseau de transports en commun et le réseau vélo. Cela nous permettra de rabattre des usagers qui viennent au centre de la métropole pour travailler. La Région a commencé à travailler sur ce réseau, la ligne entre Tours et Loches a été rénovée. À Montlouis-sur-Loire, on est passé de 4 à 17 allers-retours par jour fin 2022. Nous avons d’autres projets de réouverture de haltes ferroviaires, dont une à Fondettes – Saint-Cyr dès septembre 2025. Cela permettrait de soulager un endroit de la métropole où le trafic routier est souvent chargé. De même au centre de Tours, place Verdun, il pourrait y avoir un pôle d’échange multimodal (PEM) assez complet avec le train, la jonction des deux tramways et le réseau vélo.

Comment mieux travailler ensemble sur cette question ?

Tout le monde se pose cette question ! L’idée serait de créer un groupement d’intérêt public pour regrouper la Région, les communautés de communes et le SMT. L’objectif que l’on s’est fixé est de travailler un pass mobilité utilisable sur les différents réseaux. Ces expérimentations nous intéressent, le but est d’étudier les potentialités sur l’ensemble du réseau et les travaux nécessaires. Nous voulons augmenter l’offre et la qualité dans les dix années à venir.

LA LIGNE TEMPO BHNS BIENTÔT MODIFIÉE

Le bus à haut niveau de service tourangeau s’appelle Tempo. Il circule en grande partie sur des voies dédiées. Depuis août dernier, sa fréquence de passage a été augmentée de 7 min à toutes les 6min30. Cette ligne parcourt actuellement 16 km et dessert 38 arrêts : elle relie Les Douets (Tours Nord) au CHU Trousseau (Chambray-lès-Tours) en passant par le site de Grandmont. Elle véhicule jusqu’à 25 000 passagers par jour, d’où son remplacement par tramway du moins dans sa partie Sud à partir du pont Mirabeau. Désormais le BHNS partira plus à l’Est, vers Saint-Pierre-des-Corps ( jusqu’au centre commercial Les Atlantes). La ligne revue fera 13km. Du sud du pont Mirabeau jusqu’au terminus à Saint-Pierre-des-Corps, 2 km seront en site propre.

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