Jean-Michel Stievenard
Jean-Michel Stievenard 
Ancien vice président de la communauté urbaine de Lille

Est-ce que le VAL est toujours moderne et novateur aujourd’hui ?

JMS : Je crois que lorsque l’on sera sorti de la période des essais, le métro de Lille sera l’un des plus modernes du monde avec des trains de 52 m à une fréquence autour de la minute. Avec le nouveau pilote automatique, on sort du schéma traditionnel où les informations sont transmises des trains vers le PCC. Là, les rames communiquent directement entre elles, ça reste totalement nouveau.

Est-ce que le VAL ne subit pas de plein fouet la concurrence du tramway ?  A Lille, les gros projets d’extensions, c’est en tramway, plus en métro, notamment en raison du coût.

JMS : Il n’y a pas photo entre la capacité d’un tramway et celle du métro. A l’origine dans les années 70, Lille a choisi le métro pour ne pas perturber la circulation automobile en surface. Aujourd’hui, la question se repose différemment entre les modes métro, tram et BHNS. Au sein de la métropole, il faut desservir toutes les communes en proposant à chaque fois le mode le plus adapté. En 2009, quand la communauté urbaine décide de passer au 52 m et d’investir 600 M€, c’est encore le lobby du métro qui domine. Aujourd’hui, la balance penche plutôt du côté du tramway. Ça explique la décision prise en 2018 – 2019 de construire deux nouvelles lignes de tram.

Et le tram a également l’avantage de faire de l’aménagement urbain ?

JMS : Le métro aussi, à la marge, notamment autour des stations. Il y a eu de très beaux aménagements, notamment à Lille, mais aussi à Roubaix où la Grand Place a été particulièrement mise en valeur par le métro.

Comment expliquez vous les difficultés actuelles sur le métro ? Est-ce le ratage d’Alstom comme de Siemens ?

JMS : Siemens a perdu « à la loyale » j’en suis convaincu. Alstom a été davantage conquérant sur ce dossier, mais a sans doute sous-estimé la difficulté, tout comme Siemens. Il a été demandé de changer le système de pilotage sans interrompre le trafic. Les lignes 1 et 2 à l’origine ont tourné à vide durant des mois avant leur mise en service commerciale. Les pannes sont inhérentes à tout système novateur. Alstom a perdu énormément d’argent dans l’affaire. Les automatismes, c’était un petit marché dans le marché. C’est vraiment la volonté du pdg d’Alstom d’aller jusqu’au bout, qui a fait que l’entreprise n’a pas jeté l’éponge.

Quel est l’avenir du Val ? Le VAL peut-il encore se réinventer, avec les contraintes qui sont les siennes ?

JMS : Je crois que dans quelques mois, quand le métro sera en service, il sera l’un des plus modernes du monde. Même si je ne crois pas à son exportation. Désormais, l’avenir de la technologie passe par Alstom. Le système Urbalis Fluence reste à la pointe, et c’est là qu’il faut voir l’avenir du VAL. Paradoxalement d’ailleurs le terme de « VAL » lui-même n’est plus utilisé. Les lillois parlent du métro, et certains ne savent même plus qu’ils montent à bord du VAL.

Bio :

Jean-Michel Stievenard a publié en 2023 « Le VAL » chez Gilles Guillon éditeur.

Universitaire, notamment à Sciences-Po Lille, il a été un observateur attentif du métro, à partir de la mairie de Villeneuve-d’Ascq dont il fut le premier adjoint puis le maire et vice-président de la communauté urbaine de Lille (devenue la MEL) durant 25 ans.

De nombreuses archives, et plus de soixante-dix des acteurs de la construction du métro ont été consultés pour en tirer une étude détaillée sur l’Histoire de ce mode de transport innovant, et plus globalement sur les mobilités au sein de la métropole.

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