Arnaud-Vahlas
Arnaud Vahlas 
DSI de Transdev France

« L’IA générative est une rupture technologique majeure pour la mobilité »

Mobily-Cités : Arnaud Vahlas, vous êtes DSI de Transdev France. Quel regard portez-vous sur l’essor de l’intelligence artificielle dans le secteur de la mobilité ?

Arnaud Vahlas : Je suis ravi d’échanger sur ce sujet passionnant. Après 15 ans d’expérience de DSI en France et à l’international, j’ai rejoint Transdev, leader mondial du transport public, présent dans 19 pays sur 4 continents. 

Chaque jour nous transportons plus de 13 millions de passagers. Notre raison d’être : Permettre à chacun de se déplacer chaque jour grâce à des solutions sûres, efficaces et innovantes. Autant dire que la transformation numérique et l’innovation sont au cœur des missions de service public que nous délèguent les Autorités Organisatrices de la Mobilité.

L’intelligence artificielle n’est pas nouvelle pour nous. Depuis plus de 20 ans, nous utilisons des algorithmes pour optimiser la maintenance, la performance des réseaux ou encore la relation et l’information voyageurs. Ce qui change aujourd’hui, c’est l’arrivée de l’IA générative (IAG), qui rend accessible un ensemble de capacités qui étaient auparavant réservées à des experts, des techniciens ou des créatifs aguerris. Et cela va transformer nos métiers à une vitesse inédite.

 

Comment Transdev se prépare-t-il à intégrer cette nouvelle vague technologique ?

Cela va peut-être vous étonner, mais notre démarche est avant tout humaine ! 

Quels bénéfices pour nos voyageurs, nos collaborateurs ? Quel accompagnement leur proposer pour éviter la rupture technologique ? 

Les projets que nous initions sont construits de façon pragmatique et éthique. Ils doivent aider nos voyageurs et nos collaborateurs, les soulager en leur faisant gagner du temps… pour leur permettre de se concentrer sur des tâches à haute valeur ajoutée, donner du sens à leur métier. L’inventivité, la créativité, l’esprit d’initiative sont des capacités (heureusement) exclusivement humaines. 

Notre premier levier d’action c’est l’accompagnement. Il s’agit d’acculturer, de former, d’adopter ces outils dans une logique de démocratisation. L’IA Gen permet une interaction en langage naturel, ce qui change radicalement la relation homme-machine. Mais cela suppose aussi de former nos équipes, pour qu’elles comprennent les usages, les limites, et sachent garder le contrôle.

Nous gardons toujours à l’esprit, l’acceptabilité sociale de l’IA Gen. L’IA Gen doit être transparente, éthique, respectueuse de la vie privée et responsable sur le plan environnemental. Une requête IA Gen consomme dix fois plus qu’une recherche Google. Il faut donc penser sobriété numérique. Et bien sûr, nous devons être en conformité avec les réglementations : RGPD, Data Act, IA Act… L’enjeu est de trouver le bon équilibre entre innovation et régulation.

 

Quelles sont les grandes tendances du marché que vous observez ?

Le marché est en pleine effervescence. On peut citer plusieurs tendances structurantes que nous suivons :

La montée en puissance de l’IA conversationnelle, notamment dans les centres de contact et les services clients, avec des assistants virtuels de plus en plus performants

La personnalisation des outils, la force de l’IA Gen réside dans sa souplesse et son évolutivité. Il est maintenant plus facile d’adapter les outils à des besoins spécifiques. 

La convergence entre IA et transition écologique : l’IA est vue comme un levier pour optimiser les réseaux, réduire les émissions et améliorer l’accessibilité des territoires. 

L’IA suscite aussi des interrogations sur l’avenir du travail. Quelle est votre position ?

Je ne crois pas à la disparition de certains métiers, mais plutôt à une augmentation des compétences. L’IA ne remplace pas l’intelligence humaine, émotionnelle, le bon sens.  Chez Transdev, nous avons une charte éthique, et réfléchissons à des usages frugaux et utiles. L’IA doit être au service de l’humain, pas l’inverse.

 

Concrètement, comment l’IA est-elle utilisée dans vos activités ?

Nous distinguons trois niveaux. D’abord, l’usage individuel pour nos collaborateurs : assistants pour rédiger des comptes rendus, résumer des documents… Ensuite, l’intégration de l’IA générative et prédictive dans nos processus métiers : modélisation de report modal, optimisation des plans de transport, prévision de fréquentation, maintenance prédictive du matériel roulant. Et surtout pour le voyageur avec l’optimisation en temps réel des trajets et expérience client augmentée…

 

L’IA Gen devient un compagnon du quotidien, au service de la performance et de la qualité de service.

Mais tout cela repose sur un socle : la data. Il faut des données fiables, en quantité suffisante et des modèles entrainés pour éviter les hallucinations. Et enfin, la technologie : cloud, connectivité, cybersécurité. Sans ces trois piliers, pas d’IA efficace ni sécurisée.

 

Un mot de conclusion ?

L’IA générative est un formidable accélérateur de digitalisation. Mais il ne faut pas tomber dans le dogmatisme ou le technosolutionnisme. Chez Transdev, nous voulons en faire un levier d’innovation responsable, au service de nos collaborateurs, de nos clients et des territoires.

Propos reccueillis par Pierre Lancien

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