86 kilomètres de tunnels supplémentaires à construire pour le Lyon-Turin ! L’Etat et les élus locaux, viennent de s’accorder pour de bon sur l’itinéraire qu’emprunteront les trains de fret et les TGV pour accéder depuis la région lyonnaise à l’entrée du futur tunnel franco-italien du Lyon-Turin située à Saint-Jean-de-Maurienne ( 57 km)
Parmi les options sur la table, c’est celle dite à « grand gabarit », la plus coûteuse – peu importe l’endettement public – qui a été officiellement retenue par l’Etat comme l’a annoncé la préfète de Région Auvergne-Rhône-Alpes le 9 décembre, relayant une décision ministérielle prise le 4 décembre.
A ce stade, son coût estimé reste en réalité un mystère. SNCF Réseau sur son site le situe à 7,7 milliards d’euros valeur 2011. Sur le site dédié au projet, il est chiffré à 8,6 milliards d’euros valeur 2020. L’AFP de son côté avance une fourchette comprise entre 10 et 15 milliards d’euros quand le communiqué de la préfecture ne cite aucun montant. « Même si nous ignorons comment il a été calculé, le plus sage est communiquer sur un quatrième chiffre, celui de 7,2 milliards d’euros valeur 2022 mentionné dans la décision ministérielle » indique un acteur important du dossier. Le devis des accès aurait donc fondu en quelques années, ce qui est exceptionnel pour ce genre de réalisation. Tout le contraire du tunnel de base (ouverture prévue après 2030) récemment réévalué à quelque 11 milliards d’euros contre environ 8 milliards au démarrage du projet dans les années 2000.
Concernant le devis de la route d’accès, on y verra plus clair à l’issue des études préalables détaillées, dont la préfète a annoncé le lancement « dès le premier trimestre 2025 » pour un budget de 164 millions d’euros.
Certitude, la future voie ferrée sur le versant français sera truffée de tunnels, pour permettre la route le plus directe. Longue de 140 km, cette ligne nouvelle en comptera en effet 86 km creusé sous les montagnes. On en trouvera répartis sur ses deux sections. Sera d’abord construite une ligne mixte fret/TGV entre Grenay, à l’ouest de Lyon et Avressieux de l’autre côté du massif de l’Épine en Savoie, sans compter une bretelle d’accès à Chambéry. Estimation : 5 milliards d’euros (selon le chiffrage du site had hoc). La seconde section, dédiée aux seuls trains de fret, doit relier Avressieux à Saint-Jean-de-Maurienne après un plongeon sous trois massifs : Chartreuse (le plus long tube avec 25 km), Belledonne et Glandon. Estimation : 3,6 milliards d’euros (selon la même source).
Les promoteurs du Lyon-Turin rêvent de voir transiter à terme 28 millions de tonnes de fret sous les Alpes, une fois le Lyon-Turin achevé. Il faudra un miracle car le trafic marchandise par train entre la France et l’Italie a dégringolé. De 10 millions de tonnes dans les années 2000 au début de la conception du projet, il s’est effondré à moins de 5 millions de tonnes aujourd’hui. Et cela n’est pas seulement lié aux contraintes techniques spécifique au vieux tunnel du Fréjus percé au XIX éme siècle, comme le dit la Transalpine, le lobby du projet. Le fret ferroviaire connait une crise structurelle.
Cette nouvelle voie redonnera-t-elle vie au rail ? Les marchandises constituent la clé de voute du Lyon-Turin, un projet qui ne peut s’appuyer sur les seuls voyageurs en raison du faible bassin de population à Lyon et du côté de Turin et Milan.
Marc Fressoz