La mise en place des ZFE doit s’accompagner d’une adaptation de l’offre de mobilité alternative à la voiture : report modal grâce aux transports publics, optimisation du mode routier avec les cars express, le covoiturage ou l’autopartage, développement de la mobilité électrique. Tout va bien pour les habitants des zones urbaines denses, mais les choses se compliquent en périphérie, et davantage encore dans les territoires ruraux, surtout quand ils ne sont pas inclus dans le périmètre des métropoles. Invité de Brice Lalonde dans le cadre d’une conférence organisée par l’association Equilibre des énergies, le 26 octobre, Sylvain Laval, président du Syndicat mixte des mobilités de l’aire grenobloise, a plaidé en faveur d’une approche à l’échelon du bassin de mobilité, seule à même de traiter l’ensemble des besoins. L’occasion d’interroger le rôle des intercommunalités dans la mise en place de Schéma directeur de recharge des infrastructures de charge pour véhicules électriques, d’autant plus indispensables à proximité des ZFE. «Il faut anticiper les besoins en charge publique et investir, mais le rendement n’est pas immédiat», souligne-t-il.
Les opérateurs privés sont prêts à équiper les zones où la demande est identifiée, mais la collectivité devra-t-elle se substituer à eux pour assurer une équité d’accès là où il y a moins de monde ? Parallèlement, la recharge à domicile est beaucoup plus facile à la campagne qu’en ville, où les garages individuels sont rares. Beaucoup d’interrogations restent à lever, à commencer par le mode de gestion des futurs contrats de concession entre collectivités et opérateurs privés.
Autre question déterminante: le déploiement des véhicules électriques. Si le prix reste le premier frein à l’achat d’un véhicule électrique, d’autres paramètres comme l’autonomie limitée ou les difficultés d’accès aux points de charge entretiennent le doute dans l’esprit des ménages français. En 2022, le coût de la consommation électrique du véhicule est venu s’ajouter aux inconvénients identifiés par les automobilistes souhaitant changer de voiture, selon les résultats de l’étude annuelle de l’observatoire Cetelem. Et 29% des Français estiment que la production électrique sera insuffisante pour répondre aux besoins de l’ensemble des véhicules électriques, à terme. Réalisée dans 16 pays, l’étude met en relief une relative circonspection à l’égard du véhicule électrique dans notre pays. Un sentiment mitigé qui se retrouve dans la perception des zones à faibles émission, que 82% des Européens interrogés jugent inéquitables pour les ménages modestes qui ne pourront pas changer de véhicule, mais aussi inefficaces pour lutter contre la pollution (61%).
Quant au futur leasing social, censé permettre aux ménages modestes de passer à l’électrique, il se présente comme assez moyennement attractif. Une simulation présentée par BNP Paribas (maison-mère de Cetelem) pour un véhicule de 25 000 € se décompose sous la forme d’une LOA de 36 mois à 99€ mensuels suivie d’un crédit à la consommation sur 9 ans avec des mensualités de 161€. Pas sûr que la formule puisse convaincre ceux qui achètent aujourd’hui un véhicule d’occasion pour quelques milliers d’euros, et « se débrouillent » pour l’entretien. Les experts mobilité de l’établissement financier rappellent aussi que, pour la Métropole du Grand Paris, seulement 20.000 véhicules sur un potentiel de 600.000 Crit’Air 3 seraient finançables via le leasing social…
Sandrine Garnier